Médias

L’affaire Pascal Praud

Publié le 12/01/2025 à 10:03 | Écrit par Jean-Luc Becquaert | Temps de lecture : 03m28s

Tout a commencé il y a trois jours. Le professeur m’a interpellé alors que j’allais sortir : « Vous devriez vous intéresser à Pascal Praud, c’est un cas tout à fait atypique qui mériterait toute votre attention ». Inutile de dire que je n’étais pas emballé : Pascal Praud, ancien cuisinier passé on ne sait comment aux commentaires sportifs pour la télévision, se retrouve aujourd’hui présentateur vedette de radio et télé sur des réseaux on ne peut plus controversés. J’hésitais à demander l’avis du capitaine, mais ne le trouvant pas, j’ouvris mon ordinateur et cherchai les dernières interventions du dénommé Praud.

« On l’a dit plusieurs fois, l’Algérie aime nous mettre dans une situation de quémandeur, Monsieur Sansal est de nationalité française, et depuis qu’il est de nationalité française, il a été embastillé ». L’Algérie serait donc l’égale de la Chine en matière de diplomatie ?

Continuons. « Ce qui m’intéresse, c’est le rapport Le Pen / Barnier. C’est ça qui est intéressant, parce que Michel Barnier est persuadé que Marine le Pen bluffe, c’est ennuyeux… il pense que l’autre bluffe au poker, parce parfois il ne bluffe pas. »
 « Ce que je peux reprocher à vous [Manon Aubry] comme à tout le monde aujourd’hui, c’est l’absence totale de modération. Je vous assure, je suis très critique sur la Macronie, mais je ne dirai pas qu’elle écrase la démocratie, je ne dirais pas que les macronistes ajoutent la violence physique à la violence sociale ». Mes éclats de rire attirèrent Bianca qui, ne regardant plus la télévision depuis très longtemps, ignorait qui est Pascal Praud. Fascinée par sa verve et son imagination, elle tira une chaise et prit place à mes côtés devant l’écran.

À propos d’Eddy Mitchell qui a déclaré que Marine Le Pen est facho : « Moi j’aime bien Eddy Mitchell, est-ce que je peux dire qu’il dit des bêtises ? Est-ce qu’on a le droit de le dire ? C’est quoi un fasciste ? Je ne pense pas que Marine le Pen soit fasciste, je ne pense évidemment pas que Monsieur Bardella soit un fasciste. Et d’ailleurs, il y a onze millions de Français qui ne le pensent pas, et ceux qui ne votent pas pour Marine le Pen ne pensent pas non plus qu’elle est fasciste. Je suis toujours un peu ennuyé par ce type de déclaration parce que tu es partagé. En même temps j’aime bien Eddy Mitchell, mais sur le plan politique c’est pas René Rémond, j’attends pas Eddy Mitchell pour avoir une bonne analyse de la société française, je ne pense pas que ce soit son meilleur rôle ; en même temps, il a tout à fait le droit de s’exprimer, il a tout à fait le droit de donner son avis, je ne lui fais pas le procès de faire ça pour être dans la posture ». Bianca et moi nous tapions sur les cuisses, le capitaine qui venait de rentrer s’étranglait dans son whisky et le professeur déclara doctement que si onze millions de personnes qui ont voté pour Marine le Pen ainsi que ceux qui n’ont pas voté pour elle ne pensent pas qu’elle est fasciste, alors personne ne le pense, ce qui est évidemment faux puisque nous connaissons tous au moins une personne qui pense que Marine le Pen est fasciste. 

La puce venait de me sauter à l’oreille.

Je lançai un dernier extrait pour vérifier l’hypothèse qui naissait dans mon esprit. « Bruno Retailleau marque en ce moment l’opinion française par une sincérité, une authenticité, une détermination, et quelque chose qui est parfois impalpable, un supplément d’âme, une sorte de souffle quand il dit que la politique est mystique, quand il fait appel à l’émotion et aux sentiments. C’est pour ça qu’il est très entendu, très écouté aujourd’hui dans l’opinion ». Essayant de couvrir nos rires, Bianca demanda qui était Bruno Retailleau, et tous en choeur, nous lui criâmes que personne ne prêtait la moindre attention à Bruno Retailleau. 

La preuve était faite. Pascal Praud a été infiltré dans le groupe Canal+ par la France Insoumise, il émaille ses interventions de contre-vérités criantes pour attirer l’attention, il a sans doute été découvert et son lyrisme cache des phrases subliminales pour qu’on aille enfin le délivrer et qu’il puisse retrouver sa vraie place d’éditorialiste de Fakir pour préparer la candidature de François Ruffin.

Il n’y avait plus une minute à perdre. « Vite, mon vieux Milou, faisons la lumière sur cette affaire avant que les Dupondt ne s’en mêlent ».

Tintin Becquaert




À propos de l'auteur(e) :

Jean-Luc Becquaert

Né dans une famille aimante et néanmoins de droite, j'étais destiné à une (brillante) carrière de DRH ou de responsable qualité dans la grande distribution. Ma rencontre à 18 ans avec l’éducation populaire dans une cave du XVIIIème (siècle) transformée en théâtre m’a définitivement détourné du libéralisme. Aujourd’hui, mon seul point commun avec Jacques Chirac, c’est le goût de la bière et de la tête de veau.


Anarchiste touche à tout et promeneur solidaire.

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