Mode sombre

La particularité des paroles de Flashback est qu’elles ont été écrites en mode bilingue. Avec ce procédé, je me suis rendu compte qu’il était plus pertinent, par exemple pour Kill Your Idols, de ne pas traduire mot à mot, mais au contraire de développer deux versions légèrement différentes selon le langage. Cela m’a donné l’idée de faire de même avec la présentation de cet album. Effectivement, pour les anglophones qui connaissent bien la musique industrielle, l’ambiguïté du propos fonctionne. C’est d’ailleurs un des paradoxes fondamentaux au genre, quelle que soit la pertinence des paroles, les prendre pour argent content, y adhérer au lieu de les questionner n’aurait pas sens alors que l’intention est de permettre la démystification des mécanismes de la propagande familiers à la société du spectacle et, au-delà, aux médias quels qu’ils soient. Par contre, pour les francophones, en particulier, celles et ceux de l’hexagone, cela pourrait au contraire sembler insensé. Particulièrement en 2023, face à la destruction systématique de tous les acquis sociaux et face à l’inaction climatique. Au mensonge originel des états capitalistes, qui oublient, volontairement, que des générations ont cotisé pour que chaque nouveau-né dispose de services et de protections, qui lui permettent de bénéficier d’une vie meilleure. Même si dans la pratique, ce sont les mêmes familles, les mêmes organisations, les mafias des deux côtés de la loi, qui en ont bénéficié. Les mêmes qui se gavent encore sur le charnier de la république française. Les mêmes qui également font leur beurre en participant activement à la destruction de la planète. Vu « L’appel à l’insurrection » de 2007 et les albums de la 6ème République, ne pas le dire, ne pas accorder mon soutien total à toutes les actions de sabotage, de blocage et de certains séparatismes serait pour le moins curieux. Leurs valeurs de travail/emploi, famille/patrie, compétition/exclusion ne sont pas les miennes. Pourtant, on pourrait penser, que je retourne ma veste, en invitant dans la présentation anglophone à célébrer et agir par delà l’humain, pour la vie elle-même sous toutes ses formes. C’est plus subtil. La réforme de la retraite, motivée par aucune autre volonté que de faire plus de bénéfices, de pouvoir détourner plus d’argent, semble-t-il, en condamnant les travailleurs à une vie de labeur… sans fin. À laquelle, s’ajoutent les expérimentations des heures travaillées, non payées dans le cadre du RSA, qui visent, à fournir de la main d’œuvre pour les boulots de merde du patronat, des fois que s’exporte la tendance massive aux états-unis à démissionner, que ce soit pour trouver un travail plus sensé ou simplement pouvoir vivre vraiment. Et vise aussi à nuire au monde associatif et au bénévolat, de la même façon, que la réforme des retraites amputera un certain nombre des personnes qui y participaient. Sans oublier le recul du droit au logement avec la loi anti-squat. Bref, on le voit bien, l’état français ne supporte plus la moindre alternative au tout commercial. Et si l’on traduit les paroles d’Alan Watts sur Society Needs Outsiders :

« - Chaque société saine permet à un certain nombre de personnes de dévier… des marginaux. Et dit qu’elles n’ont pas besoin de participer à son grand jeu. Tandis qu’une société malade et illégitime, ne peut permettre que cela se produise. »

On comprend à quel point cette société est malade, peut-être en phase terminale, avec ce que ça suppose comme horreur à venir. Si on ne se soulève pas. Mais, se soulever, c'est déjà redresser la tête, penser par soi-même, être autonome. Tout l’inverse de se polluer la tête, par exemple à coup de vidéos, qui nous confortent dans nos certitudes, tout en introduisant des germes néfastes. Cependant, il me semble que se mobiliser pour les retraites, ne peut avoir un impact, que si c’est une mobilisation unitaire. Je ne prends pas unitaire dans le sens des organisations, mais dans celui du champ des revendications. Quant à la rime avec le système immunitaire, elle n’est pas innocente. Pour se libérer de cette maladie, qui corrompt toute la société, il ne s’agit pas de se mobiliser contre la réforme des retraites, mais pour la réforme de la société ! 
Les syndicats qui, depuis des années, n’ont plus rien à voir avec les syndicats nés du mouvement anarchiste, sont juste des parasites de plus, à la façon des politiciens et de leurs partis, qui n’ont que vocation d’empêcher l’autonomie et la solidarité de la population.
Et lutter pour la refondation de la société, cela veut dire ne pas lutter pour de l’argent, ou pour des intérêts corporatistes. Mais bien pour l’ensemble de la population...
(Enfin quasi, car il faudra bien trouver une façon de neutraliser l’action des prédateurs, tant sur leurs victimes, que sur les projets collectifs. Sans cela, ce seront les mêmes trahisons et mensonges politiques, la même lutte pour le pouvoir, au lieu de sa restitution à chacune et chacun.)
...et de ses intérêts réels.
Pourquoi pas a minima :
- La lutte contre le réchauffement climatique (Décroissance et alternatives énergétiques, liberté d’établir un réseau d’échange électrique entre particuliers)
- Un revenu universel (Qui ne soit pas une refonte à la baisse des allocations...)
- La baisse du temps de travail, hebdomadaire et à l’échelle de la vie.
Enfin, mes propositions n’ont pas plus d'intérêt, que celles que pourrait faire quiconque qui essaie d’analyser la situation et d’y répondre en se mettant en retrait, en étant ouvert d’esprit, et en mettant en pratique ses idées dans sa vie (avec plus ou moins de réussite).

Pour revenir à Flashback, l'idée est de montrer à quel point tout est bouclé. Des cycles et des étapes, cette vieille spirale du nombre d’or.
Pourquoi persister à montrer ce qui est sous la surface ?
Parce que pour moi un album est juste le témoignage de l’expérience du vécu. Une trace sonore, une relique d'une étape de vie, qui peut se consommer ou au contraire être comprise, que ce soit conceptuellement, symboliquement ou encore par le ressentir.
Flashback est disponible en téléchargement gratuit ici https://archive.org/details/yoshiwaku_flashback
Les 3 Vidéo Art Clips qui seront peut-être complétés sont disponibles gratuitement ici https://archive.org/details/flashblack-outsider-omnibus-musical 
La fleur qui traverse un grillage sur la pochette de l'album a été prise en photo à l'As-de-Pique à Parcey.


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À propos de l'auteur(e) :

Robot Meyrat

Éternel débutant, Chercheur de singularités, Créateur de chimères, Expérimentateur d’inédits. Inscrit dès la naissance à l’école de la Vie. Il m’arrive d’être drôle à mon insu. Je suis mon chemin. Résister au courant principal jusqu’à la Mort et au-delà.


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