Culture

Courbet le magnifique dans l’objectif de François Royet

Publié le 17 janv. 2025 à 19:05 | Écrit par
Christophe Martin
| Temps de lecture : 03m39s

Bien qu’on soit payé au lance-pierre et pas reconnu à sa juste valeur, le métier de pigiste réserve parfois de très belles surprises. Tel a été le cas de mon interview avec François Royet, un documentariste qu’on m’avait chaudement recommandé. Partis pour 20 minutes d’un entretien que je m’étais promis succinct pour m’épargner l’ingrat labeur de dérushage, nous avons échangé pendant 1 heure 24, à peine plus longtemps que son long-métrage Par-delà les Silences qui sera présenté en sa présence et celle de Charles Belle au Majestic le mardi 21 janvier à 20h00. Pourtant ce n’est pas de ce film-là que je voulais vous parler mais de Courbet la tourmente, un court-métrage de 13 minutes disponible sur le site de notre homme. François Royet m’a narré l’histoire de ce court-métrage que je m’en vais en 2-2 vous conter. 

Lorsqu’il commence à s’intéresser à Courbet, le cinéaste tombe sur une foison d’informations et il se dit qu’en solo, le travail va être compliqué. Il contacte alors un de ses amis bisontins l’écrivain Guy Boley (pas encore publié à l’époque mais depuis édité chez Grasset) qui accepte d’écrire un scénario avec lui. Ils se rendent vite compte que le court-métrage sera trop réducteur. Petit à petit, c’est devenu un film de trois heures. Petit à petit, cela veut dire en trois ans d’un travail d’écriture certes par intermittence mais tout de même très conséquent. Une fois le projet bouclé, les co-scénaristes décident d’envoyer le résultat au Centre national du Cinéma, le fameux CNC. Comme aucun des deux n’y a ses entrées, François Royet s’était dit qu’un bon scénario n’allait pas suffire : il faudrait qu’il soit très bon pour être repéré. 

Le projet intitulé « Courbet le Magnifique » a ainsi passé toutes les commissions pour aboutir en pleinière. 

Le CNC contacte alors le cinéaste et lui dit : « Voilà, on est embêté, on a beaucoup aimé votre scénario, par-contre ça part tellement dans tous les sens, c’est tellement foisonnant, qu’au vu de ce que vous avez déjà réalisé et qui est plutôt intimiste, les gens de la commission ont un doute sur votre capacité à réaliser ce que vous avez écrit. » Le CNC propose alors à François Royet de lui allouer une somme qui d’habitude est réservée à des écrivains qui n’ont jamais tourné pour qu’ils réalisent une séquence de leur film afin de voir comment ils transposent ce qu’ils ont écrit, un test donc afin d’obtenir l’aide financière définitive. Il s’agissait de lever le doute sur le projet Courbet mais le CNC y a ajouté une condition : « Ne réalisez pas juste une séquence de votre film, on sait bien que vous allez savoir la faire. Faites quelque chose qui lève totalement le doute et qu’on puisse se dire : il va le faire briller encore plus. Vous avez carte blanche et vous allez être jugé à votre manière de réagir au challenge qu’on vous impose. Puis vous repasserez ensuite en commission avec le scénario et cette maquette. » Sortir de trois ans d’écriture dans une certaine forme « un peu à la Brazil » et devoir trouver autre chose, voilà de quoi se prendre la tête. François Royet a mis du temps à réagir mais il a néanmoins réussi à écrire la maquette, seul cette fois-ci. Le tournage a lieu et la maquette repart pour le CNC, le tout en six mois de travail. 

Réponse du CNC : « Votre maquette a bluffé tout le monde. Mais entretemps, la Commission a été renouvelée et cette fois-ci, il y a des gens qui ont des doutes sur votre scénario. » BAM ! Retour à la case départ. 

Mais François Royet ne lâche pas totalement l’affaire. Il sait qu’avec la forme qu’il a adoptée dans la maquette, il évite le pompier, la reconstitution historique plan-plan. « Avec Courbet, c’est juste, on est au bon endroit, faut que ça brasse, que ça remue. Et en plus ça coûtait beaucoup moins cher. » Le court-métrage rend parfaitement cet état d’esprit, bien loin de la reconstitution minutieuse mais laborieuse qui aurait coûté une fortune, au plus près du personnage, de ses coups de gueule, de son engagement artistique et politique, de sa verve tonitruante. François Royet ne lâche donc pas l’affaire mais il accuse tout de même le coup, il manque de jus pour reprendre le projet qui lui aurait pris, à vue de nez, au moins six mois, seul cette fois-ci avec surtout aucune perspective de financement. Le projet n’est donc pas définitivement enterré mais la maquette date de 2001, François Royet avait 24 ans de moins, il en a 62 aujourd’hui. Mais même si l’entreprise cinématographique n’aboutit pas, cette maquette restera un petit chef d’oeuvre.

Sur Viméo, c’est par ici.



À propos de l'auteur(e) :

Christophe Martin

Passionné de sciences humaines mais d'origine bretonne, je mets mes études en anthropologie et mon humour situationniste au service de mon action politique et sociale.

Formateur dans l'industrie et pigiste au Progrès
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