Humeur

La cancoillotte et le satellite

Publié le 02 mai 2025 à 07:34 | Écrit par
Jean-Luc Becquaert
| Temps de lecture : 02m53s

Ma qualité de correspondant en Occitanie des Libres Commères m’a attiré une notoriété à laquelle je dois bien dire que je ne m’attendais pas. Certes, elle ne dépasse guère un cercle de personnes que ma compagne et moi invitons de temps en temps à notre table, mais il faut bien considérer que c’est le frémissement d’un mouvement qui n’aspire qu’à s’étendre pour peu que j’élargisse le nombre de mes amis ou que je nourrisse mieux celles et ceux qui le sont déjà. Toujours est-il que vers la fin du mois de mars, l’un d’entre eux nous apporta un pot de cancoillotte.

D’habitude l’une nous fait parvenir un coq de son poulailler, un autre des fromages de chèvre de la ferme de son frère, d’autres encore des tomates ou des haricots de leur jardin. Il ne faut nullement y voir une marque de notabilité, même dans notre sud on ne monnaie plus une intention du curé ou une visite du médecin par des produits de la terre. Je ne suis d’ailleurs ni médecin ni curé, et à ma connaissance ma compagne non plus. Il faut juste y voir que nous passons pour fins cuisiniers et que parfois ces dons en nature cachent une certaine fainéantise de leur part à préparer les repas et sans doute aussi à faire la vaisselle. Nous avons donc préparé un plat de pommes de terre au four largement enrobées de cancoillotte chaude. 

« Pourquoi de la cancoillotte aujourd’hui ?

- Le canard dans lequel tu écris, il est bien en Franche-Comté, non ?

- Oui mais à Dole dans le Jura et la cancoillotte c’est plutôt un fromage du Doubs.

- Arrête de chipoter, c’est de toute façon un fromage très diététique et il vient de la Biocoop, tu peux en manger sans crainte pour ton poids. »

Un peu vexé quand même par cette allusion à mon physique je préférais mettre fin à cette conversation stérile et me régaler de ce plat aussi savoureux qu’inattendu. Cependant je ne pouvais manquer de voir dans cette anecdote la révélation d’une réalité bien plus profonde. Les Libres Commères sont un journal internationaliste. Au contraire du mondialisme et de sa conséquence tangible, la mondialisation, l’internationalisme est l’idée que les particularités d’un groupe, d’une ville, d’une région ou d’un pays peuvent être partagées bien au-delà des frontières et des murs formant ainsi un réseau dense et solidaire entre les femmes et les hommes qui peuplent notre planète. Et pour parler comme dans le poste, à faible émission carbone, car il suffit de quelques exemplaires d’un journal ou de quelques pots d’un fromage pour tisser des liens sans doute ténus mais bien réels entre des dizaines ou des milliards d’humains.

Le mondialisme est l’idée que tout sur terre doit être pareil et simplifié de façon à permettre la diffusion en grand nombre de bricoles plus ou moins grandes et plus ou moins utiles et d’idées plus ou moins nauséabondes et plus ou moins oppressives. Et pour parler comme dans le poste, à très haut taux de carbone puisqu’il faut un nombre toujours croissant d’avions, de satellites et de data centers pour renforcer le pouvoir et la fortune de quelques sociopathes.

Adonc pourquoi une multitude riche de millions d’idées, de méthodes et de recettes se laisse-t-elle oppressée par quelques individus robotisés par leurs stéréotypes et leurs aprioris ? Je vous laisse lâchement réfléchir là-dessus mais il me semble que les réponses sont déjà dans la question. 

Ami.e.s jurassien.ne.s, une tome des Monts de Lacaune ou des coustils confits vous seront un magnifique prétexte à réflexion, de mon côté, j’ai prévu morbier et vin d’Arbois. Et retrouvons-nous le mois prochain.



À propos de l'auteur(e) :

Jean-Luc Becquaert

Né dans une famille aimante et néanmoins de droite, j'étais destiné à une (brillante) carrière de DRH ou de responsable qualité dans la grande distribution. Ma rencontre à 18 ans avec l’éducation populaire dans une cave du XVIIIème (siècle) transformée en théâtre m’a définitivement détourné du libéralisme. Aujourd’hui, mon seul point commun avec Jacques Chirac, c’est le goût de la bière et de la tête de veau.

Anarchiste touche à tout et promeneur solidaire.
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