En cherchant l’anagramme de dorure…
Ça nous aura coûté la bagatelle de 930 000 boules le salon doré de l’Élysée. Mais sur un budget de 5 millions annuels, me direz-vous! 15 000 feuilles d’or, soit 390 grammes, à 53 euros le gramme, ça nous fait seulement 20 670 euros. C’est pas ouf! Ça doit être le fait de le mettre en feuilles pas bien épaisses, ce mini-lingot, qui augmente la note, et la centaine « d’artisans de l’excellence » à des cadences infernales qui trimé pendant cinq semaines. Tout ça pour redorer des intérieurs qui n’aident pas ce petit Louis II de bazar en lévitation à garder les pieds sur terre.
Les roitelets du vieux monde ont toujours eu besoin d’apparat dans le mobilier. J’ai appris dernièrement qu’Hitler aurait rêvé de devenir architecte-décorateur d’opéra. Je dis « aurait rêvé » mais il a réussi : le IIIème Reich est une mise en scène achevée question décorum. Le nazisme avait besoin de toute cette débauche ornementale pour masquer la sordidité intellectuelle de son projet réactionnaire. J’ose espérer que la macronie n’a rien de tel à cacher… et puis non même pas. On ne peut rien attendre de ces gens-là.
D’un naturel bolcho-médiéval, je suis plutôt du côté amish et lampe à huile en ce qui concerne la déco. Le falbala clinquant de ces cabinets dorés me donne mal au coeur sans doute un peu à cause des bourgeois imbus de leur classe sociale (et pas intrinsèque) qui font mine d’y avoir des idées de génie pour l’avenir… de leurs intérêts.
Mais pour recevoir des étrangers de marque, me rétorquerez-vous ?! Putain, je vous sens en forme ! Si on veut donner une image de la France royaliste des chandeliers, c’est réussi. Le jeune président moderne a fait long feu. Emmanuel Macron est un ringard et il appartient déjà au patrimoine des erreurs politiques. L’Élysée lui va comme un écrin à une chevalière en toc. Le président des quiches raisonne toujours comme si nous n’avions jamais quitté les Trente Glorieuses et que consommer comme des bourrins était encore à l’ordre du jour.
Notre avenir est ailleurs. Un certain nombre d’entre nous sommes déjà dans une certaine sobriété et on y trouve notre compte. Pas besoin de dorure sur les ongles des orteils ni de président à paillettes non plus. Pas besoin de monarque du tout d’ailleurs. Faut trouver autre chose. Parce que c’est pas demain la veille qu’un Pepe Mujica va pousser dans les salons de la Vème république.
J’adore les vestiges. Les vrais. Pour avoir visité Babylone retapée par Saddam Hussein, je lui préfère Petra qui tombe en ruines. Sur le Doubs, à Dole, il ne reste que deux arches du Pont roman. L’une d’elles, rive gauche, subit actuellement une restauration qui tient de la reconstruction pure et simple. Elle menaçait de s’effondrer certes, d’être emportée par une crue du Doubs (ce qui serait une bonne nouvelle, la crue, pas l’effondrement). On va en faire un goulot pour le kayak, m’a-t-on dit. Cool! Les saumons vont adorer. Les romantiques pourront continuer à aller rêver rive droite, du côté de la vieille arche, à l’ombre des grands arbres, à l’heure du héron. Il en faut pour tous les besoins.
Que la Municipalité doloise ne prenne pas ombrage de ce petit coup de canif ! Si, si, on vous a vus, on sait que vous savez que nous existons. On aura l’occasion de la féliciter pour avoir apporté son soutien au très beau projet de jardins familiaux aux Mesnils-Pasteur. Des petites cabanes en bois sur des parcelles de terre arables pour faire pousser ce que cette planète fait de mieux: la vie tout simplement. Un projet tout à fait amish.
À propos de l'auteur(e) :
Christophe Martin
Passionné de sciences humaines mais d'origine bretonne, je mets mes études en anthropologie et mon humour situationniste au service de mon action politique et sociale.
Formateur dans l'industrie et pigiste au Progrès
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