Bon anniversaire, Vache qui rit® !
Le début du mandat municipal coïncidant avec le covid, j'ai pris le mesure des mondanités revenant à l'élu municipal quand les mesures sanitaires se sont desserrées. Les invitations à des cérémonies, remises de prix, commémorations et autres lancements d'événements se sont multipliées dans mon courrier. Il y avait du temps à rattraper, l'envie d'un retour à une vie sociale et dans certains cas aussi un budget à utiliser. Mes activités familiales, professionnelles ou militantes ne me donnent pas souvent l'occasion d'y répondre. Mais c'est, au même titre que les conseils municipaux, quelque chose qui fait partie de ma formation d'élu, puisque c'est ainsi que je conçois ce mandat dans l'opposition. Une de mes apparitions parmi le gratin dolois (c'est comme le gratin dauphinois mais le fromage à tartiner remplace la crème) se devait de respecter le thème de la nourriture. C'est surtout que ma curiosité a été aiguisée par les événements qui entouraient les 100 ans de la Vache qui rit® : la presse et le site de la ville faisaient promotion du jeu de piste donné à jouer durant la journée ainsi que du son et lumière projeté sur la médiathèque le soir, mais rien concernant la réception qui aurait lieu entre ces deux activités. Le Dole Notre Ville de Novembre publierait sûrement une photo et un court article de cet anniversaire organisé autour du directeur du groupe agroalimentaire, mais la propagande institutionnelle est quelque peu « orientée » et souvent « sélective ».
Sur la place de la Mairie, Miss Franche-Comté et ses dauphines (quand je vous parlais de gratin !) posent devant les pots de fleurs pour les passants. À l'intérieur, contrôle du pass sanitaire. De nombreux verres vides attendent sur une table dans le hall ainsi que dans la « salle des mariages ». Un beau lieu pour une fête, cet hôtel de ville. Je suis arrivé parmi les premiers et le hall se remplit peu à peu. Il y a finalement pas mal d'invités, et à part les élus municipaux de la majorité (les autres étant absents), je n'en reconnais pas beaucoup. Entre les discours et leurs remerciements d'usage et mes échanges avec les autres invités, j'ai su qu'il y avait des élus de collectivités diverses, des représentants des « chambres consulaires » (industrie probablement, agriculture possiblement), des cadres de chez Bel (une petite partie donc des quelques 400 salariés de l'usine), des membres des amis de Pasteur, des collectionneurs (Vachequiriophiles), ainsi qu'un arrière petit-neveu de Léon Bel.
Selon les élus, les discours étaient plus ou moins longs, plus ou moins bons. Il a été question de l'historique de l'entreprise et de l'importance de la découverte de la pasteurisation (on reconnaît le prof d'histoire), du soutien inconditionnel à l'économie locale (on reconnaît le comptable), de tous-les-sujets-à-la-suite-sans-approfondir avec par exemple un raccourci pâture=verdure=écologie (vous l'aurez reconnu). Avant de parler des valeurs forcément humaines de l'entreprise familiale et de son virage en cours vers la décarbonation, ainsi que de l'existence d'usines et de clients partout dans le monde, le directeur a rappelé que les fromageries Bel étaient le croisement de ce qu'on trouvait sur le territoire. Le lait issu de l'agriculture bien sûr, et les machines à emballer les portions issues de la micro technique locale. Aujourd'hui, le cheddar des portions ne vient probablement plus de la région mais elles y sont toujours conditionnées. Et quand on voit les machines fonctionner, il est très impressionnant de voir les portions se faire emballer avec des pliages incompréhensibles à une vitesse folle. Mais ça reste des portions individuelles d'une part, et de l'aluminium d'autre part (peu recyclé quand il fait cette taille, et incriminé entre autres dans la survenue de certaines maladies neurologiques). De ce point de vue, décarboner est une bonne chose, mais la dissémination d'emballages multiples et problématiques est aussi à interroger.
Pour commencer à bien faire les choses, il faudrait déjà éviter le gaspillage. Et ça ne concerne pas que les entreprises. Sur les tables, il reste des plateaux. Dans le camion frigorifique aussi... Deux fois moins d'invités présents que d'invitations lancées. Les bouteilles entamées finissent dans les égouts de la ville. Quant aux gougères et autres petits-fours surnuméraires, je n'ose pas imaginer ce qu'ils sont devenus...
Nicolas Gomet
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