Mode sombre

Je lisais un joli texte sur « face-de-bouc » à propos des souvenirs de Noëls enchanteurs.

Lumières, chaleur, cousins-cousines et famille réunie…

Ah ! Fichtre ! Que j’eusse aimé vivre de pareils moments partagés…

Vous allez trouver mes Noëls d’enfance moins réjouissants mais tant pis, osons dire parfois l’envers du décor.

Enfant, je me faisais tout un monde à regarder vivre les gens « normaux ». Quand la lumière de leurs fenêtres nous laissait voir le confort, l’amour et la plénitude de la sécurité matérielle. Je m’en faisais des contes et des films à la hauteur de mes manques.

Et à Noël, c’était pire… sapins illuminés et cadeaux et câlins et joie et tout ce que nous promettait cette fête forcément magique.

La force de l’imaginaire console mais elle creuse aussi le fossé entre la dure réalité et le désir, un peu comme pour la petite marchande d’allumettes…

Ni tendresse ni lumière et un cartable en carton bouilli, cadeau utile. Quand ce n’était pas des culottes de coton ou des chaussettes. Quand t’es pauvre, faudrait pas t’égarer dans le superflu.

J’arrivais pas à être heureuse…

J’avais froid dans mon petit manteau qui grattait.

Fin de la période « Cosette » qui fait pleurer dans les chaumières.

J’ai grandi, j’ai conjuré le sort en organisant des Noëls de bonne bouffe, de gros cadeaux et de réunions familiales. On peut pas toujours être triste et calamiteux !

Mais… la fête ne fut jamais complète. Un vieux serrement de cœur demeure.

Je trouve que ces réjouissances programmées accentuent les solitudes, les abandons et les misères. Et ça me rend triste. Je me suis souvent débrouillée pour travailler les soirs de Noël, un évitement volontaire.

Aujourd’hui, nantie d’une « famille choisie », d’un enfant aimant, je me réjouis et vais choisir les livres à offrir ou les chocolats. Je m’applique et je suis contente.

Malgré tout, je préférerai toujours les partages impromptus et les dîners de potes chaleureux aux fêtes imposées. Nous ne sommes pas heureux sur commande.

Et tout ce battage consumériste me saoule.

Je n’en garde pas moins ma bonne humeur. D’ailleurs, j’adore les huîtres.

 


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À propos de l'auteur(e) :

L'irrévérencieuse

Rombière réfractaire et iconoclaste, sage comme un orage et qui puise ses forces dans la fraternité.


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