Humeur

La Feuille (sinémurienne)

Publié le 25/09/2024 à 10:58 | Écrit par Iléon Tataniel | Temps de lecture : 05m08s

La citation du jour : "How dare you ? You have stollen my dreams and my childhood with your empty words ": Greta Thunberg.

J’avais prévu un sujet plus trivial, mais dans l’urgence, la prochaine conférence de notre ami Stéphane Haslé, (NDLR: qui es déjà passé pour une banale affaire d’espace-temps) je suis amené à anticiper ma réponse. 

Qu’une fille de quinze ans interpelle les leaders mondiaux, ça n’est pas banal, mais elle a parfaitement raison ! J’ai cependant envie de dire aussi : "Et alors ? Qu’est-ce qu’on fait maintenant ? Que font-ils maintenant, à part nous donner des réponses vides de sens ?" 

Le militantisme, c’est bien, mais la réalité devant le désastre qui se prépare, c’est que l’on ne fait rien !
 Pendant, le confinement, on a remarqué un léger mieux dans la couche d’ozone, les canaux de Venise ont retrouvé une vie meilleure ... la réduction de notre activité a montré rapidement des signes de progrès. Pour autant, la reprise effrénée de nos activités quotidiennes a hélas, rapidement fait fi du progrès environnemental observé. 

La raison en est simple – selon moi – tous les systèmes économiques sont fondés sur le même concept : la croissance, avec pour corollaire la recherche du profit, une fuite en avant économique désastreuse à laquelle tout le monde participe (je veux parler ici des citoyens des pays nantis, car on ne saurait reprocher aux populations qui vivent misérablement d’aspirer à une amélioration de leurs conditions de vie). 

Petite analogie personnelle : Je suis né, et j’ai vécu jusqu’à l’âge de dix ans au Maroc, et bien que j’ai pu plus tard remettre en question le système colonial, à dix ans je n’avais aucune raison de le faire. Et il en est de même pour les générations actuelles : pourquoi devraient-elles remettre en question leur milieu matriciel ? Certains le feront sans doute plus tard, quand d’autres s’y complairont. L’éducation, certes pourrait y remédier, mais est-ce suffisant ? 

A la veille de la chute de l’empire romain d’occident, Augustin d’Hippone se plaignait que face au désastre annoncé, la préoccupation majeure de certains était de savoir quel serait le programme des prochains jeux de cirque. 

Autre problème, la démographie : à ma naissance en 1950, le monde comptait 2.5 milliards d’habitants, nous en sommes maintenant à dépasser les 8 milliards, soit en 75 ans un coefficient multiplicateur de 3.2 : du jamais vu ! J’ai tenté à maintes reprises d’aborder le sujet sous cet angle, mais invariablement, l’on m’a envoyé paître, le concept est politiquement incorrect chez les écolos ! 

Une autre analogie "personnelle" : En tant que géologue, je connais un étage géologique, le Sinémurien (+/- 195 Ma Jurassique Inférieur ou Lias), qui affleure parfois dans la région ; ce niveau est constitué à +/- 90 % de coquilles d’huitres : le Calcaire à Gryphées (Gryphea arcuata) à odeur fétide, ce niveau constitue ce que l’on appelle une thanatocénose (ensemble des restes ou fossiles d’organismes vivants qui se trouvent dans un même lieu) provoquée entre autres choses par la prolifération locale excessive des dites huitres.

Autres sujets à méditer : Le bilan carbone de l’Europe s’améliore, pas mal, oui mais le bilan mondial s’aggrave. Les grands pollueurs mondiaux ne font rien, et l’exemple de Trump qui a nié et continue de nier le réchauffement climatique, parce qu’il risque de pénaliser l’économie américaine est édifiant.
 L’Inde qui a promu une agriculture moderne pour lutter contre ses problèmes chroniques d’insuffisance alimentaire, se retrouve maintenant confrontée au problème de l’appauvrissement des sols et ... à un déficit en eau dans certaines régions. L’agriculture dite biologique est tellement à la mode aux USA, qu’elle génère plus de problèmes que l’agriculture intensive. Et que dire de nos super-hypermarchés qui jettent jusqu’à 1⁄3 des produits alimentaires importés à grand frais de lointains pays (bananes, avocats, ananas ...) et tentent de nous les vendre parce qu’ils sont tendance, et de notre société qui génère plus d’ordures en tonnage que de diplômés. 

Petit rappel historique :  "En mai 1917, les mineurs de la Phelps Dodge, plus importante compagnie minière de Bisbee (et propriétaire du seul journal local), se mettent en grève. Ils veulent de meilleures conditions de travail. Le 12 juillet, 1 300 mineurs et supporters sont encerclés par près de 2 000 hommes armés. Les grévistes sont envoyés à 320 km de là, dans le désert du Nouveau- Mexique, sans eau et sans nourriture. Les déportés demandent le soutien du président Wilson. Une commission officielle est nommée. Le 6 novembre 1917, elle dénonce la déportation. Si les grévistes peuvent alors rentrer chez eux, les « déporteurs » ne seront jamais poursuivis." 

Les déporteurs étaient pourtant tous de bons croyants puritains. Me trompè-je ou ont-ils inspiré nombre de nos dirigeants ? C’est me semble-t-il devenu un modèle récurent dans notre société, mais d’une façon plus subtile bien sur, maintenant, on y met les formes. 

Ma compagne regarde souvent 28 minutes, l’émission d’Elizabeth Quin ; je dois dire que j’y ai moi-même renoncé, car j’ai l’impression qu’on y dénonce beaucoup ... et que le lendemain, une fois la page tournée, on oublie. 

Dois-je continuer à jeter en vrac des exemples bien connus des tares de notre modèle économique bien-aimé ? Restons en là, mais encore une fois si de la discussion peut jaillir la lumière (curieusement les sages chinois prétendent que de la discussion ne jaillit pas la lumière) seuls comptent réellement les faits, si le résultat est positif. 

Avant de nous quitter, je voudrais dire un mot des Nénets – population autochtone samoyède de Russie – qui vivent actuellement encore dans un environnement impossible au nord du cercle polaire. Ils s’y sont adaptés sans violence pour l’environnement et y vivent heureux. 

Les Bédouins, vivent également dans le désert, un des milieux les plus hostiles que j’ai connus avec celui des Nénets

Ces gens vivent et survivent dans ces milieux pour une raison unique en dehors du fait qu’ils connaissent parfaitement leur environnement, c’est qu’ils n’ont jamais essayé de dominer leur milieu respectif. Et pourtant ... ils sont eux aussi menacés par le "progrès", leur seule défense étant le "terrorisme". 

Autre chose, j’ai lu récemment que dans une grotte unique en son genre aux USA, le biotope a été mis en péril par un simple paquet de chips abandonné qui a permis la prolifération de bactéries nuisibles. Même le tourisme "vert" est devenu une nuisance. Quant au tourisme de masse, n’en parlons pas, ce qui n’empêche pas certains de prétendre que si l’on s’y oppose, on pénalisera les classes populaires ... l’impasse ! 

Bon un cliché pour finir : "Réfléchir, c’est bien, agir c’est mieux" 




À propos de l'auteur(e) :

Iléon Tataniel

Producteur de salades (les textes) et penseur solitaire.


Géologue éclectique

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