Les tartuffes de nos campagnes
Article initialement paru dans l'édition papier de décembre mais ce petit mois de décalage rend la lecture de ce texte encore plus pressante.
L’actualité agricole, après une gestation de neuf mois, aura accouché de quoi ? Du néant ? Presque ! Voilà 9/10 mois que le précédent mouvement de contestation agricole a eu lieu. D’une ampleur inégalée tant au niveau français qu’européen, le monde agricole avec sa diversité ainsi que la société civile de plus en plus concernée par le sujet avaient les yeux rivés vers Paris et Bruxelles. En vain ! Non seulement l’attente est toujours présente mais l’année catastrophique que les agricultrices et les agriculteurs viennent de passer fait ressortir et met en exergue ce qui avait été la trame de fond de ce précédent mouvement en ce qui concerne le revenu agricole. A partir de cette grogne légitime, les syndicats majoritaires en ont profité pour reprendre les rênes de la base agricole afin d’en faire un véritable cheval de Troie ! La représentativité agricole est un système complexe et inégalitaire avec à la clef la direction des Chambres d’agriculture départementales. Il faut sans complexe préciser qu’en janvier 2025, auront lieu les élections des dites Chambres d‘agriculture et que les enjeux de pouvoir sont immenses. La disparité nationale des régions laisse envisager un nouveau dessin de la représentativité agricole avec la perte de certaines chambres anciennement acquises par le syndicat majoritaire. Le sud-ouest en sera sûrement le parfait exemple. Il en devient légitime de se poser la question de la sincérité de la sortie de la majorité des drapeaux pour la défense du peuple paysan mourant ou du besoin de montrer ses forces dans une visée électoraliste.
Comme lors du précédent mouvement, ce qui revient sur le dessus de la table se divise en plusieurs thématiques : actuellement le Mercosur (lisez ici libre échange), les normes, la paperasse administrative, l’UE, le revenu et des fois quand même l’avenir pour un secteur qui va perdre en 10 ans la moitié de ses paysans. On en vient ainsi à se rendre compte que la ferme France est mal en point. Enfin pas tout le monde, et les tartuffes sont de sortie !
Alors on nous vend quoi ? Un truc simple ! Il va de soi que le traité Mercosur est une concurrence déloyale pour le paysan français qui, dans la majorité des cas, est manipulé par l’agro-industrie et ne maîtrise ses prix de vente ! Oui, oui, voilà un métier où c’est en fait l’acheteur qui décide de ta rémunération. Donc face à cela au lieu de monter le débat un peu plus haut qu’au ras des pâquerettes, on nous dit : « Oui, on ne peut pas produire avec les même méthodes qu’outre-atlantique, c’est déloyal. Effectivement, c’est vrai mais en vrai, Mr Rousseau, vous qui êtes à la tête du groupe Avril et qui venez d’ouvrir une usine d huile en Amérique du sud, est-ce vraiment emmerdant pour vous et vos copains qui avez capté 80 % des aides PAC alors que vous ne représentez que 20 % du peuple paysan ? Le dessin mériterait d’être bien plus détaillé mais la caricature fera l’affaire. Le discours de ce cher monsieur et de ses copains est de proposer au ministre, via une contestation légitime, sa propre feuille de route et surtout de continuer à détricoter des normes et un système qui favorise leurs intérêts tout en affirmant le contraire à la base. Comme le disait Edgard Pisani, ce que nous avons fait il y a 40 ans n’est pas forcement à continuer au présent et peut être fondamentalement remis en cause pour rester dans l’Histoire du monde et non pas permettre l’effondrement du monde paysan. On a donc un peuple paysan aux bonnets et aux drapeaux de couleurs honteuses et nauséabondes. Ce sont ces mêmes représentants qui ont intérêt à ce que le nombre de fermes diminue encore et encore pour encourager leur propre extension, qui détricotent les règles environnementales sous couvert d’être compétitifs vis a vis des autres pays alors que la réalité est la connivence avec le lobby des phytos. L’installation ? Masacarade ! Encore une fois, moins il y aura de paysans nés, plus l’agro industrie d’Avril et de Rousseau continueront de prospérer !
Peuple paysan, émancipe-toi de ceux qui, depuis des générations, ont fait semblant de te défendre, de ceux qui sont responsables à leur niveau des cordes hissées dans nos hangars !
La priorité pour que vivent nos fermes sont le revenu garanti par des prix minimum d’entrée, des prix minimum garantis, puis enfin un plan environnemental d’avenir qui permettra la pérennité de nos productions et de notre terre.
Non au libre échange que sont le Mercosur ou le Ceta ! Non aux normes créées et défendus par le libéralisme et l’agro industrie !
Oui à la ferme familiale et transmissible, de qualité, de nos terroirs et de la pérennité alimentaire, celle qui protège ses paysans et paysannes et son environnement !
Vincent Perrin.
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