Tout commence par un article pamphlet du Figaro qui fustige l’intervention sur France-Inter de Pierre Rigaux, « petit chevau-léger de l’écologisme ultra » et « khmer Vert », qui rendrait le comté directement responsable de la dégradation de l’environnement et de la souffrance des bovins. Bon, c’est vrai que Rigaux pousse un peu loin de bouchon du raisonnement logique et moral même s’il est dans le vrai sur la pollution et la souffrance animale. En journaliste mal embouché à la recherche du buzz médiatique, Cyril Hofstein transforme l’interrogation en interdiction et voilà la cavalerie droitarde qui s’emballe, représentant local de l’État en tête.

Mais quelle mouche a piqué le Préfet du Jura, Pierre-Edouard Colliex ? Pourquoi ce zèle à défendre le terroir dès son arrivée et cela sur les réseaux sociaux ? Une envie de devenir populaire ? D’être spirituel ? De jouer les influenceur ? De faire le buzz ? De gagner un abonnement gratuit au Figaro ? Écoutez-moi, ce post : « Le comté, c’est du Jura, du goût, du calcium, des protéines… et zéro culpabilité. Un savoir-faire millénaire, des éleveurs engagés, une filière locale et coopérative exemplaire. L’interdire ? Autant interdire les couchers de soleil sur le Jura. Restons sérieux ! » Cela aurait été une bonne idée de remonter à la source comme dans une enquête de police. Et certains d’embrayer… on en est à 183 commentaires et 610 partages. Jean-Philippe Lefèvre à qui on ne connaissait point cette veine sociale s’émeut : « Il est grand temps de faire taire les extrémistes de salon ! Je souhaite bonne chance au représentant des verts qui viendra se confronter à des étudiants des Enil de Poligny ou Mamirolle où j’ai eu la chance d’enseigner pendant 10 ans ! La filière comté, l’une, sinon la plus vertueuse des filières dans la fromagerie tant sur le plan du cahier des charges que sur celui de la redistribution des fruits du travail… ce n’est pas un hasard si l’on parle de fruitières à Comté!!! » Et hop ! Tous les Verts dans le même sac ! Et pas un mot bien sûr sur la surproduction. Passons la parole à Claude Monnoyeur : « Putain ! mais c'est pas vrai ! » Merci Claude pour ce cri du coeur. Figaro, celui de Beaumarchais, aurait apprécié la verdeur de votre idiome. 

Et vous, Brigitte Meunier, je vous laisse l’entière responsabilité de vos propos :  « Un non sens comme d’habitude ces écolos!! Qu’ils viennent dans les fruitières du Ht-Jura, nous ne sommes pas prêts moi la 1ère et les touristes ensuite( de plus en plus nombreux) d’arrêter de manger du Comté pour le plus grand bien être des vaches, des sols et de la biodiversité, comme l’ont montrer d’innombrables études scientifiques !! » Manger du comté pour le plus grand bien-être des vaches ? Ça laisse rêveur. 

Bon, laissons parler la voix de la sagesse et surtout celle de quelqu’un qui sait de quoi il retourne, celle de Vincent Perrin, éleveur de porcs bio, ni ayatollah naturaliste ni capitaliste sans vergogne : « C’est comme devenu une petite chanson récurrente des gens qui n’y connaissent rien ou survolent le sujet. Ce sujet dont tout le monde va s’emparer pour régler ses comptes de débats politiques devenus stériles. D’un côté comme de l’autre. Peu de précision sur la réalité du terrain. Mais une chose est sûre : c’est que vous ne pouvez pas nier les effets négatifs de cette production sur l’environnement. Et en même temps, les côtés vertueux de cette production a contrario d’autres filières laitières françaises. Et comme souvent l’augmentation des volumes y est pour beaucoup. Le mufle des Montbéliardes ressemble désormais à celui des Holsteins a contrario de l'origine mixte de cette race. Faire pisser du lait à 8000 litres par lactation est bien naturel, bien raisonnable pour ce que cela sous-entend pour la suite ? Mais rassurez-vous, il vaut mieux de facto vendre du comté à Dubail que de sauver les truites de la Loue. » Finalement, notre sage est plus ironique que prévu.

En tout cas, une chose est sûre : si l’affaire prend de l’ampleur sur le plan national, Jean-Luc Mélenchon va enfin être un peu tranquille.