Politique

Brèves, taxes et fraternité

Publié le 10 déc. 2025 à 06:51 | Écrit par
Christophe Martin
| Temps de lecture : 04m36s

Le numéro papier de décembre est sorti et comme d’habitude, tout n’est pas rentré dans ce huit-pages bourré à craquer. Alors voici quelques brèves tirées de la corbeille.

PAUVRES PROPRIOS.- On pourrait croire son clavier bien tempéré mais Patrick R. s’est récemment ému sur les réseaux sociaux de la suppression de la taxe d’habitation (TH) au profit de la seule taxe foncière (TF). Ça date un peu cette affaire mais bon. « Une minorité de citoyens finance presque à elle seule le fonctionnement de la collectivité, tandis que les autres en bénéficient sans y contribuer. Juridiquement admis, ce déséquilibre constitue pourtant une injustice sociale majeure et un danger démocratique. » Les propriétaires seraient donc les nouvelles victimes fiscales à défendre. Mais notre plaignant, probablement par atavisme foncier, ne fait pas le distinguo entre propriété d’usage et propriété lucrative. Le locataire est un profiteur, c’est bien connu. Il abuse de la générosité du rentier qui lui sert de logeur. « Pendant des décennies, la taxe d’habitation garantissait que chaque foyer, selon ses moyens, participait à l’entretien du bien commun. Cette participation, même symbolique, créait un sentiment d’appartenance au territoire et rappelait que la collectivité est l’affaire de tous. La disparition totale de cette contribution pour une partie des habitants a créé ce que les philosophes du contrat social redoutent : une communauté divisée entre financeurs captifs et usagers exonérés. Le risque n’est pas théorique : il est éthique, social et politique. Les propriétaires ressentent une injustice grandissante, tandis que les locataires sont, malgré eux, déconnectés de la réalité budgétaire locale. Cette dissociation détruit la notion même de « bien commun ». Lorsque l’on ne contribue plus à un service, on cesse progressivement de se sentir responsable de sa pérennité. La solidarité publique se transforme en consommation individuelle. Le lien social s’étiole. (…) En continuant sur la voie actuelle, nous affaiblissons nos communes, notre cohésion sociale et notre modèle républicain. Rétablir l’équité contributive n’est pas un choix technique : c’est un choix de société. Sans cela, la fracture grandissante entre ceux qui paient et ceux qui ne paient plus menace de miner, silencieusement mais sûrement, le lien qui fait de nous une communauté. » On ne saurait si bien dire, ceux qui cherchent à détruire la Sécurité sociale en sont une parfaite illustration : si je vais à la clinique grâce à une grosse assurance complémentaire privée, l’hôpital public peut bien se casser la gueule, ma prostate s’en bat les c… Sociologiquement contestable, la position de Patrick R. pourrait néanmoins faire l’objet d’un débat : l’impôt participe-t-il encore aujourd’hui à la cohésion sociale et au sentiment national ? Auquel cas, l’émietter en taxes et ponctions aussi nombreuses que mal comprises comme le font aujourd’hui les gouvernements roublards pour mieux les faire passer n’est-il pas contre-productif s’il s’agit de faire adhérer le peuple à l’impôt ? Pour la taxe Zucman, voir plus bas.

Mais Christian R. vient de lever la main pour intervenir. On l’écoute : « Sans oublier que les plus inégalement taxés sont les propriétaires de résidences secondaires 1) assujettis à la TF 2) seuls assujettis à la TH 3) ne bénéficiant généralement pas de tous les services publics locaux 4) discriminés dès que l'occasion se présente (ex. tarification particulière pour certains services comme les OM)!!! » OM pour ordures ménagères bien sûr, n’allez pas lui faire dire n’importe quoi !  Finalement avoir une résidence secondaire, c’est peut-être bien un truc pour les gens qui en ont les moyens. Doit-on vous plaindre, cher Christian ? Nous vous encourageons en tous cas à lire la brève qui suit : puisse-t-elle vous porter conseil ? Henri Le Moël.

LE JOUR OÙ LA DAME DE FER A FLÉCHI.- Le 28 novembre 1990, il y a donc un peu plus de 35 ans, Margaret Thatcher a pleuré. Une de ses très mauvaises idées fiscales l’a conduit à démissionner. Au lieu de faire payer les services des autorités locales en fonction de la valeur des propriétés, les Tories, les Conservateurs avaient mis en place une « poll tax », un impôt par tête de pipe. Partout en Grande-Bretagne, les ménages de la classe ouvrière ont organisé une campagne contre cette taxe en refusant de s’y inscrire, puis tout simplement de la payer. À l’apogée du mouvement, cela a tout de même représenté la bagatelle de 17 millions de contribuables. Ni les tribunaux, ni les huissiers n’ont pu débloquer la situation et les Tories se sont pris une énorme dérouillée aux élections suivantes. Une élection au sein du parti conservateur a poussé Maggie Thatcher à la démission, puis carrément à la retraite. Les Tories ont tenté de minimiser la poll tax tout en continuant à l’appliquer, mais le mouvement du refus de paiement n’a pas flanché. Finalement, en 1991, ils ont été contraints de l’abolir et de mettre en place une nouvelle taxe d’habitation, basée à nouveau sur la valeur des propriétés. Tina Bigmouth.

LA TAXE ZUCMAN EXPLIQUÉE À LA DÉPUTÉE.- Patrick R. qui se réjouit, toujours sur FB, de la parfaite maitrise des finances municipales serait bien avisé d’aller parler de fraternité fiscale et de solidarité devant l’impôt à la députée Justine Gruet, ainsi qu’à ses deux collègues jurassiennes, qui ont voté en masse mais en conscience contre la proposition de loi en faveur de la taxe Zucman. Je rappelle qu’une députée défend l’intérêt public et en particulier celui des habitants de sa circonscription. Aussi j’aimerais bien savoir l’intérêt de qui elle a défendu en votant non : qui dans le coin, peut bien dépasser la barre fatidique des 100 millions ? Pas elle, j’espère. Daniel Germond ? Pierre Gattaz n’habite pas dans la troisième circo, dites-moi ? Ça fait quand même pas beaucoup de monde. Sans compter que 2 % sur un paquet qui t’en rapporte au moins le triple par an, c’est peu. Mais, semble-t-il, encore trop pour madame Gruet et ses mentors. Alfred Bush.



À propos de l'auteur(e) :

Christophe Martin

Passionné de sciences humaines mais d'origine bretonne, je mets mes études en anthropologie et mon humour situationniste au service de mon action politique et sociale.

Formateur dans l'industrie et pigiste au Progrès
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