Mode sombre

Monsieur le Président, je vous fais une lettre que vous… ne lirez pas, bien évidemment.

Votre suffisance ne vous permet pas d’accéder à l’Autre… enfin pas à celui qui n’est pas de votre rang !

Cher Maréchal, donc,

Je ne vais pas être longue. Je tenais juste à vous dire BRAVO.

Bravo… car à chacune de vos allocutions, vous gagnez. Vous prenez le pouvoir en poursuivant votre quête de la division, en réhabilitant sans cesse le pouvoir de l’individualisme et de la pensée binaire. Divide ut reges...

Depuis votre dernier délicieux charabia insensé, vous avez réussi à faire émerger des idéaux et des propos, jusqu’alors terrés dans les maisons, confinés avec leurs propriétaires.

Depuis ce lundi 13 avril, la pensée binaire a refait surface. Certes, je me doutais bien que nous n’avions pas réussi à l’éteindre. Mais je ne pensais pas qu’elle serait de retour, si vite.

Nombreux sont ceux qui ont ouvert leur porte, ont regardé sur leur palier mais n’ont pas encore choisi de voir un peu plus loin sur le chemin, de ne pas s’interroger vers où pourrait mener cette nouvelle route. Nous pouvons, pourtant, observer nombre de choses à 1 km à la ronde.

Chacun réagit selon son intérêt ou celui de sa corporation… ce dont l’autre, différent, vivant une autre réalité, peut avoir besoin, peu importe.

Encore une fois, nombreux sont ceux qui cherchent l’ennemi au-delà, ailleurs, qui revisitent la notion d’injustice. Chacun y va de sa révolte individuelle. La pensée complexe a des difficultés à émerger.

Pourtant, nous sommes encore quelques-uns à croire ou à vouloir un monde nouveau.

Cher Maréchal, aujourd’hui, je me demande, comment ont fait des milliers d’hospitaliers pour faire garder leurs enfants, vous savez, ceux qu’on applaudit encore et que vous avez décidé de définir comme des héros pour être sûr de ne rien leur devoir... et comment ils feront demain, encore ?

Je me demande comment vit une personne gagnant 600 euros par mois, vivant dans 40 m² à 5 personnes, sans jardin, sans cour, et comment elle arrive à aider son enfant pour limiter l’inégalité scolaire ?

Je me demande comment fera un intermittent du spectacle, vous savez celui qui nous amuse, qui nous fait sourire ou rire, qui nous libère de nos quotidiens lourds et ternes, vu qu’il ne réussira pas à faire ses 500 heures, et n’aura, donc, pas droit à son misérable chômage, cette année ?

Je me demande, parce que encore un peu nantie au bout du compte, comment vivent ceux que vous avez abandonnés, vous et vos prédécesseurs, et peut-être nous aussi, d’ailleurs ?

Et là, je fais comme bon nombre, je reste partisane... je me demande comment va aller le monde ?

Nous passons notre temps à regarder le fonctionnement de nos voisins européens, toujours inscrits dans cette pensée binaire : « T’as vu ? C’est bien géré en Allemagne, la crise », « T’as vu ? Les élus néo-zélandais, y zont donné 20 % de leur salaire »… Les envier nous évite de regarder chez nous et de penser à construire la vie autrement, le lien autrement, la politique autrement… à réfléchir, quoi !

Vous, cher Maréchal, tout ceci vous convient à merveille. Nous allons continuer à être égocentrés, à râler un peu quelquefois mais… Je crains que peu ne « se réinventent », pour reprendre vos propos dignes d’un mauvais livre de développement personnel mal écrit (alors qu’il y en a de très bien, vous devriez les lire !).

Oui, cher Maréchal, à chacun de vos discours, vous gagnez un peu plus… et ce, sans aucun talent ni charisme… Bravo !

Normalement, la semaine prochaine, vous allez produire les mêmes pitreries indécentes et insignifiantes. Par suite, nombreux sont ceux qui devraient monter sur leurs grands chevaux égotiques. Puis, in fine, nous poursuivrons comme avant, parce que je crois que la leçon ne sera jamais apprise, sans force ni fracas.

Je ne vous écouterai pas. Et je ne vous entendrai pas. Mais je serai de ces fracas.

Je ne vous salue bien évidement pas. Non que je ne le veuille, mais je ne le peux.

 

Cassandre


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