Sortir du piège sanitaire
Faute de pouvoir proposer un véritable projet de société et une vision d’un après pourtant annoncé par Macron lors de ses discours de crise (#sachonsnousréinventer…), le gouvernement continue à nous confiner dans la médiocrité. Après le délire sécuritaire de 2015, voici le délire sanitaire de 2020. On patauge dans un bourbier de propagande et d’informations contradictoires avec un niveau de sénilité rarement atteint depuis Pétain. On porte le masque pour faire trois courses alors qu’on cherche en vain des malades en réanimation. Les préfets nouvellement nommés font du zèle sous leur képi, les élus en surpoids nous la jouent paternalistes et protecteurs et les flics font comme d’habitude, stupidement, un boulot qu’ils ne comprennent pas. Votre voisin réactionnaire se prépare à entamer une carrière de délateur et votre p… de boulangère refuse de vous servir si vous avez oublié votre capote bucco-nasale. Bref, nous sommes dans un vaste piège prophylactique, un de ces gigantesques cratères d’obus, plein de boue, au fond duquel vous retombez inéluctablement malgré tous vos efforts pour ramper vers l’air libre le long de la paroi glissante. Vous objectez ?… et voilà qu’un ami bien pensant vous balance un « oui mais tu sais… la santé des plus fragiles… ». Vous essayez de le raisonner?… et il vous répond que la responsabilité républicaine et la solidarité nationale et l’hygiène rédemptrice et la sécurité dans les EHPAD et que nos héros à l’hôpital et que « quand tu applaudis, tu sauves des vies »… Y a un moment, c’est plus la peine de discuter. Qu’il s’étouffe avec sa cagoule en rase campagne, qu’il se bousille les mains au gel hydroalcoolique et qu’il pense déjà à voter Macron en 2022 parce que « tu comprends en face, il n’y a que les Le Pen ». En plein bombardement, ce n’est peut-être pas le meilleur moment pour expliquer à un Gilbert Montagné tétanisé par la peur qu’il a mis son slip sur sa tête. Et pourtant…
Au-dessus de ce piège, plane une classe politique arriviste et cupide, les mêmes qu’avant mais d’autant plus suffisants qu’ils se savent coupables de tout ce merdier viral. Ils continuent à servir les intérêts de la caste de rentiers dont ils sont issus ou qu’ils cherchent à rejoindre. Ils sabotent l’économie et la planète en annonçant des plans de relance foireux, ils interdisent les manifestations en annonçant la deuxième vague, ils chantent l’Europe pendant que nos industries se barrent en Asie. Et surtout la bande à Castex, et tous ceux qui n’osent pas remettre en cause le discours officiel parce que « tu comprends, moi, sur les dossiers techniques et médicaux, j’écoute BFMTV et France Inter… », tous ceux qui croient encore que ces profiteurs de pandémie veulent notre bien, bref le gouvernement, ses sbires et tous ces fumistes passifs nous font croire que nous vivrons éternellement si on se tient bien tranquille derrière nos muselières en papier à attendre qu’on nous sauve sans bouger le petit doigt de pied mais en tendant le cul pour qu’on nous pique contre le mal.
Va falloir se secouer les amis ! Se sortir la tête du nombril et arrêter de croire qu’on va tous vivre jusqu’à 110 ans parce qu’on se lave les mains 20 fois par jour, qu’on est le centre de gravité de l’univers et que l’humanité ne pourra pas se passer de nous. Comme Socrate, nous sommes humains et mortels et quand il a fallu boire la cigüe (poison), le philosophe n’a pas demandé à être reconfiné pour avoir du rab existentiel. Si l’avenir, c’est la survie en sous-sol, sous cellophane, avec Amazon en perfusion, ce sera sans moi. Je n’ai pas spécialement envie de mourir demain mais je ne vous cache pas qu’un jour, vous aurez à vivre sans moi et que si je peux laisser un bon souvenir, deux ou trois sourires et quelques idées derrière moi, ce sera déjà pas mal.
La vie, c’est un risque. Si ce n’est pas la peine de s’exposer au danger plus que nécessaire, il est absurde de croire qu’avec des précautions médicales et de la biotechnologie, on sera éternel. Il faut laisser ce genre de conneries transhumanistes aux milliardaires sans cervelle. La vie, la vraie, c’est quelques dizaines d’années bien remplies pour se faire une petite place au coeur de ses proches, au sein de son quartier, de sa nation et de l’humanité qui s’empressera pourtant de vous oublier. J’espère mourir sans amertume mais pas sans colère, avec un peu de dignité, une certaine fierté même, à jour avec mes projets qui resteront malgré tout en plan. J’espère mourir pas trop subitement pour avoir le temps de me retourner sur ce que j’aurai fait de pas trop mal. J’espère mourir pas trop bêtement.
Certains disent qu’on meurt toujours trop tôt mais je crois que ce qui est pire, c’est de mourir trop tard… et trop con.
À propos de l'auteur(e) :
Christophe Martin
Passionné de sciences humaines mais d'origine bretonne, je mets mes études en anthropologie et mon humour situationniste au service de mon action politique et sociale.
Formateur dans l'industrie et pigiste au Progrès
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