Ma rage contre la police
Samedi 19 juin, je suis tombé un peu par hasard sur un live de l’indispensable Rémy Buisine, le reporter de choc sur Brut. Quand j’ai entendu Redon, ça a tilté dans ma tête: c’est à une encablure d’où habite ma fille et son copain qui ne sont pas les derniers à se rendre à une teuf champêtre. Ils étaient déjà à Lieuron pour la Saint-Sylvestre et je me doutais bien qu’ils étaient allés faire un tour. Ça n’a pas raté! A mon message, elle répond par une petite vidéo : on y voit des images d’une rave bon enfant, pas plus d’attroupement que dans une zone commerciale et des gamins au grand air. Rien à voir avec les images d’apocalypse de brut. Je demande s’ils ne sont pas blessés. Réponse: « Non, nous ça va, on a été prudent mais c'était vraiment le bordel, on a même pas pu repartir. Les flics nous canardaient de bombes lacrymogènes et LBD dans les sous bois. » Puis un peu plus tard, je lui demande s’ils sont rentrés : « Non, ils ont commencé la musique qu'à 7h donc on profite un peu sous la pluie. Dans tous les cas, on est nassé sur le site, donc on repartira quand ça sera safe. » J’ai continué à visionner la vidéo de Rémy Buisine. Ma fille m’a confirmé plus tard au téléphone le déluge de lacrymos, partout, n’importe comment, sans sommation. Les FO ont gazé même les résidences à la périphérie de Redon alors que les teufeurs n’étaient pas encore sur place, des bombes lacrymos alors qu’il y avait des gens et des chiens dans les voitures, des tirs de LBD dont ne va pas parler le Figaro, des grenades de désencerclement alors qu’on n’y voyait plus rien. Elle a vu passer le jeune avec la main arrachée et les flics qui refusaient de l’aider. Quand elle a pu enfin quitter le site samedi, les gendarmes étaient tout sourire et très courtois mais ils ramassaient toutes les douilles et les munitions qu’ils pouvaient trouver dans l’herbe. Ma fille ne nie pas qu’il y a eu des affrontements et que des jeunes ont balancé des bouts de parpaings mais elle m’a raconté sans détailler que les gendarmes ont hurlé des choses parfaitement dégueulasses aux manifestants. Des vidéos circulent où l’on voit la destruction du matos et des sonos. On voit même un schmitt lacérer un abri. Un autre défonce des enceintes au pied de biche. Je ne décolère pas depuis samedi matin. Je n’ai d’habitude qu’une confiance extrêmement limitée dans la police et nos rapports se limitent au strict minimum mis à part les RG locaux que je chambre gentiment pendant les manifs.
Mais là, on a vraiment affaire à des enflures et qu’on ne vienne pas me dire que les gendarmes mobiles et gnagnagna! J’espère simplement que ces mecs-là n’ont pas de gamins et n’en auront jamais. Je me demande simplement ce qu’ils peuvent bien avoir dans le crâne et sous le casque, quelle haine les anime pour se comporter comme des robocops sans cervelle, comment ils peuvent tant détester ce qui ne ressemble pas à un bourgeois à cravate ou un paramilitaire comme le préfet du 35 qui annonce tranquille que le matériel sonore a été « neutralisé » et que la foule a été dispersée en 45 minutes. Menteur! Tartuffe!
Contrairement à ce qui se scande jusqu’à Berlin, tout le monde ne détestera pas la police. Y aura toujours des droitards et des froussards à les applaudir dans les défilés, des aveugles qui croient encore aux institutions et au changement par les urnes et qui diront qu’un hommage à Steve risque de gâcher une fête de la musique qu’ils iront soutenir avec un masque et des oeillères entre 19h00 et 20h30. Sans moi, les mecs! Ni la semaine prochaine ni dans un an! On vous laisse la culture covid et les urnes à gogos.
Les gendarmes de Redon sont à l’image du pouvoir en place et de ceux qui le supportent : violents et décérébrés. Ils peuvent bien prétendre qu’ils sont le dernier rempart contre le chaos. Le chaos, c’est eux! On est de plus en plus nombreux à ne plus tolérer cette mascarade. Ne pas vouloir renverser ce système où des mecs en armure répondent docilement aux ordres d’une administration elle-même aux ordres d’une poignée de dégénérés moraux, c’est lui laisser la bride sur le cou. Il n’est pas question non plus d’aller au massacre en solo. Je ne sais pas encore comment on réussira à empêcher la police de nuire et à en faire à nouveau le bras armé de la vraie justice. Il faut pour le moment continuer à avoir la rage et à s’organiser pour rester contagieux!
À propos de l'auteur(e) :
Christophe Martin
Passionné de sciences humaines mais d'origine bretonne, je mets mes études en anthropologie et mon humour situationniste au service de mon action politique et sociale.
Formateur dans l'industrie et pigiste au Progrès
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