Humeur

Rencontre dans un bar

Publié le 10/11/2021 à 12:22 | Écrit par La Rédac' | Temps de lecture : 02m19s

Il m'est arrivé dernièrement d'aller dans un bar. J'y suis resté bien longtemps, jusqu'à ce que mon sang se confonde le plus parfaitement du monde avec la bière que j'avais ingéré. 

Au milieu, des groupes de personnes de tous âges, toutes conditions sociales, tous horizons. La fête, la vraie. Celle du mélange. 

Je réfléchissais à notre époque en regardant ce peuple dansant et riant, à ce clivage sanitaire qui nous est imposé, à la peur qui grandit lorsqu'un homme s'est approché d'un de mes amis pour le saluer. 

Cet homme n'avait rien de particulier si ce n'est des vêtements laissant à penser qu'il était chef de PME, à minima commercial. 

Je l'ai salué aussi, contraint, et il m'a broyé la main. 

- Tu es chef d'entreprise? Lui ai je alors demandé. 

- Pas le moins du monde. 

- Tu es vendeur de piscine au moins? 

- Non plus, je fais un métier que les gens détestent. 

Mon innocence et mon ébriété m'ont joué des tours parce que je n'avais pas compris qu'il était policier. 

Et il était triste! Un vrai calimero! 

Alors que je le chambrais (J'ai une fâcheuse tendance à me moquer amoureusement du monde lorsque je suis saoul), il m'a invité à sa table, où il y avait 2 mecs : un banquier et un gendarme. 

- Gendarme ? Tu t'entends avec les policiers ? 

- Ah mais non, mais avec lui c'est différent. C'est mon pote. Alors on a mis au point une règle : on ne parle pas boulot quand on se voit. 

J'imagine que ne pas parler des violences policières est de bon ton quand on a un copain flic. 

- Et toi tu fais quoi? 

- Moi ? Je suis d'extrême gauche, voire anarchiste. Ai-je répondu l'air bravache des mecs qui se demandent comment ils vont pouvoir se barrer. 

- Je peux te poser une question? 

- Oui. 

- Tu penses quoi de zemmour ? 

Bordel! Voilà que je me dresse et, tout en respiration et amour pour mon prochain, je réprime des insultes. Tout juste je me borne à dire que zemmour sépare les gens, qu'il joue à l'intelligent, que son programme est celui de macron mais en version raciste et que rien ne sortira de lui qui pourrait améliorer la vie des gens. J'ai cru que c'était une conversation. Ce n'en était pas une. 

Il m'a répondu : 

  • Moi je vais voter pour lui. 

Je me suis demandé pourquoi il me répondait ça. Jusqu'à ce que je vois ce qu'il attendait. Pas de discussion. Juste une affirmation. On s'en fout des idées, au fond, on ne va pas débattre. On affirme qui est son favori, comme une vulgaire élection de la plus belle vache au salon de l'agriculture. 

Et ces mecs avaient l'air triste ! Mais triste! 

J'ai répondu que peut être il devait réfléchir à cela. Je suis parti. 

Au loin, j'ai regardé ces trois quinquas pleurer sans larmes et se regarder tristement. 

Ils avaient des rides de souffrance. 

Ils avaient perdu foi en l'humanité. 

Tant pis pour eux. 

Tant pis pour tous les mecs qui se réfugient dans la haine.

Le bateau du nouveau monde joyeux va passer devant leur ile déserte et eux ne le verront même pas.

Notre unique devoir: la convivialité.

 

Benjamin Alison




À propos de l'auteur(e) :

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Donner la parole à ceux qui ne l'ont pas, voilà une noble cause ! Les articles de la Rédac' donnent le plus souvent la parole à des gens que l'on croise, des amis, des personnalités locales, des gens qui n'ont pas l'habitude d'écrire, mais que l'on veut entendre...


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