Cet article a été publié dans le numéro papier de mars et n’a donc strictement rien à voir avec l’actualité. La Rédac’

Je me permets, ici, de faire un point sur deux concepts que nous entendons beaucoup et souvent mal utilisés. Loin de moi l’idée de donner des leçons mais bien d’éclairer sur le sens. 

Nous avons, deci delà, ici et là, une certaine propension à considérer que le monde manque « d’empathie » ou, au contraire, « a trop d’empathie ». Pour la première réflexion, c’est pas faux, voire c’est certain ! 

Cependant, que signifie l’empathie ? Et l’utilisons-nous toujours dans le bon sens ? Quelle différence avec la compassion ?

Déjà étymologiquement, empathie et compassion ne viennent pas du même pays !

Empathie, le terme est composé du préfixe grec en «  dans, à l’intérieur  » et pathie « souffrance, ce qui est éprouvé ». L’empathie est donc cette faculté, cette capacité à éprouver l’émotion de l’autre, la reconnaître et la comprendre. L’empathie ne nécessite pas de vivre l’émotion de l’autre mais bien de la concevoir. Elle n’attend pas de réponses, ni de remèdes particuliers, juste l’intégration de son existence. L’empathie s’exerce dans un miroir réflexif de l’émotion de l’autre. Elle n’inclut pas le « je ». L’empathie nécessite une certaine capacité de distanciation à l’émotion de l’autre, lui laissant soin de l’exprimer mais de ne pas permettre qu’elle se mêle à ma propre émotion. Elle accompagne l’autre dans sa propre perception des besoins et désir pour remédier à l’émotion vécue.

Il existe trois formes d’empathie  :

- l’empathie émotionnelle  : on ressent l’émotion, l’état affectif de l’autre

- l’empathie cognitive  : on est en capacité de comprendre les pensées et les intentions de l’autre

- l’empathie mature qui est une combinaison des deux autres.

L’empathie n’engage aucunement de notion de moralité, du bien ou du mal. Elle n’implique pas, vraiment, une action de celui qui reçoit l’émotion, à part de la comprendre (prendre avec !)

Compassion, le terme est composé du préfixe latin (ah ! Ces Romains !) cum « avec » et passio « souffrir ». La compassion, quant à elle, implique de ressentir l’émotion, la plus souvent négative,  de l’autre, et, ainsi, de lui trouver un remède, un pansement. La compassion implique de vouloir aider l’autre, de le sauver de sa souffrance. Dans la compassion, il s’agit d’agir pour aider (le fond de commerce de notre éducation judéo-chrétienne, entre autre). Et pourtant « l’enfer est pavé de bonnes intentions ». A la différence de l’empathie, la notion de distanciation se révèle être quasi impossible en compassion. En compassion, l’émotion de l’autre, sa souffrance, devient ma propre émotion. Ceci peut induire que le compatissant agisse selon ses propres besoins ou ses propres carences, par manque de temps de compréhension de l’émotion de l’autre. La compréhension de l’autre se limite le plus souvent à nos propres désirs, les projetant sur un potentiel désir de l’autre. Dans la compassion, l’émotion du « je » et du « tu » ne fait qu’un, se mélange, s’enlace. « Hummm viens toi, mélangeons-nous d’émotions ! » En bref, la compassion est un sentiment qui invite à partager les maux et les souffrances des autres, elle est engageante à l’autre.

Donc, pour faire un gros résumé, l’une nécessite de comprendre, l’autre nécessite d’aider.

Nous aurions pu aussi faire un point sur la sympathie. Mais comme je ne lui pas, nous le reprendrons plus tard.

Après ce léger éclairage grossier, j’espère que nous serons en mesure de faire la différence. Cependant, que ce soit d’empathie ou de compassion, le monde en manque cruellement. 

Par ailleurs, pour le repos de ma psyché, pour lui conserver le peu de safe qui lui reste, je ne vous cache pas que je suis plus fan de l’empathie que de la compassion  ! Et je ne manque pas d’empathie mais sûrement de compassion !

Alan Pattie.