Mode sombre

Je vais être de mauvaise foi! Ça tombe bien: je suis un mécréant. Jean-Baptiste Gagnoux a inauguré samedi 11 janvier son local de campagne. Je vous passe les blagues sur l’enfumage et les vapoteuses que je laisse aux mauvaises langues qui feront bien évidemment le rapprochement entre l’ancien magasin de cigarettes électroniques et ce siège d’édile en campagne. Non, je m’intéresserai plutôt à ce #DOLOIS2020. 

Analyse sémiotique. 

Rien n’a été laissé au hasard dans cette campagne de l’en même temps. Je rappelle que LAREM et les LR soutiennent la candidature de Jean-Baptiste Gagnoux qui n’en fait pas un blason à deux têtes. Ce qui tend à prouver qu’on peut être au pouvoir et dans l’opposition. Le clocher de la Collégiale est certes emblématique de Dole: ça nous change du Pasteur dont on va bouffer pendant trois ans (quoiqu’à bien y regarder, le clocher a une forme de seringue…). On ne vantera jamais assez la douceur apaisante du clocher. Solide comme un roc, dominant et veillant sur la ville, plein d’histoire et de fierté franc-comtoise, et accessoirement symbole du catholicisme pratiqué le dimanche entre 10 et 11 ding dingue dong.

Je rappelle aux plus jeunes que François Mitterrand doit une partie de sa victoire en 1981 à ce clocher que Jacques Séguéla, le publicitaire à la Rolex, posa en arrière plan pour rassurer les catholiques effarouchés par l’arrivée des Bolcheviks.

On peut remarquer, mais c’est sans aucun doute une pure perfidie de ma part, que le mot LOi (pas LOL pauv’tache!) s’emboite parfaitement, et dans Dolois, et dans le clocher. Subliminal, non?! La foi et la tradition qui chapeautent le droit et la justice… ou pur hasard malencontreux? Voilà pour l’axe vertical, sorte de fusée bénie oui oui qui mène à la mairie. Ami fidèle du dimanche, on ne te dit pas tout, on ne te dit pas tout! Mais ton église t’a habitué au secret, n’est-ce pas?

Sur l’axe horizontal, le hashtag (#) symbolise la modernité du numérique, la fibre dont s’équipe la cité Pasteur pour la troisième décennie du XXIème siècle. Alexandre Douzenel (Monsieur Numérique de l’équipe municipale) n’apparait pas par hasard (à trois reprises) sur le clip de campagne dont Jean-Marie Sermier est le grand absent. Ah oui, j’oubliais… pas de logo politique.

Que dire sur le reste? C’est pastel, insipide, minimaliste, sans aspérité et sans imagination. On est #DOLOIS2020 comme on tapisse un appartement qu’on veut louer sans courir le risque de déplaire à qui que ce soit. Ce n’est ni beau ni vraiment moche. C’est juste fade. Comme le nouveau revêtement de la zone piétonne. Ça manque de cachet. Telle une boite d’aspirine. On en viendrait presque à regretter « Ensemble, on avance », le slogan de Jean-Marie Sermier. Mais en 2014, il fallait reprendre la mairie d’assaut à la gauche planplan. Là, le candidat sortant a rangé les étiquettes politiques. Ni LR ni LREM mais Instagram et Facebook. C’est presqu’un signe des temps: l’économie et la communication chassent le politique. #DOLOIS2020, c’est le logo du consommateur avec un look de banquier-assureur.

En fait, c’est ça, le coeur de cette campagne! Il y a plus de couleurs dans le logo d’instagram que dans tout le reste parce que tout y est aseptisé. Je cherchais le mot depuis le début mais je le tiens. On va avoir droit à une campagne aseptisée, sans microbe, pasteurisée comme le coeur de ville que cette droite qui n’ose plus s’affirmer comme telle veut faire vivre par des animations aussi artificielles que commerciales. Le patrimoine et en même temps le pouvoir d’acheter. Pas d’idéologie, pas de relief, pas d’éclat. Et surtout pas de cabane. Tout va bien, messieurs dames, vous pouvez dormir tranquilles, tout est calme, chloroformé, désinfecté, javellisé. Cette campagne pour la mairie a décidément une odeur de piscine!

 


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À propos de l'auteur(e) :

Christophe Martin

Passionné de sciences humaines mais d'origine bretonne, je mets mes études en anthropologie et mon humour situationniste au service de mon action politique et sociale.


Formateur dans l'industrie et pigiste au Progrès

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