Mode sombre

Je ne supporte pas le jeu d’acteur de président Macron. Il est mauvais. J’ai préféré le compte-rendu du Figaro. La double peine en quelque sorte. Et puis j’ai finalement mis la main sur le texte intégral dans Paris-Match. A ce niveau-là, ça tient de la punition sévère. 

Dès mardi midi, c’est confinement ! Ça, c’est moi qui le dis parce que s’il répète à souhait qu’on est EN GUERRE, président Macron n’est pas capable de lâcher le mot « confinement » ! C’est pourtant finement amener cette assignation à résidence. Pour une bonne quinzaine et plus si affinités. 

En même temps, nous payons notre indiscipline, notre inconscience et notre légèreté face à une crise sanitaire réelle ! C’est vrai, 1000 fois vrai, cher internaute macronard grâce à qui j’ai carrément été lire la version officielle, mais l’indiscipline, espèce de béni oui oui, c’est le pouvoir qui en fait preuve depuis janvier ! Les Français ont agi comme des cons… peut-être… mais l’exemple vient d’en-haut depuis si longtemps… Fallait pas les faire voter, ces irresponsables, si on voulait pas qu’ils aillent après au parc, au marché et sur les quais où Madame Brigitte Trogneux, elle-même en balade, les a épinglés comme des collégiens qui sèchent ! 

Et donc nous voilà cons finis et confinés! Je télétravaille depuis lundi matin, entre mails, messageries, dropbox et pdf. Au lieu de 7 heures de cours, je me suis tapé une réunion en multiplex avec une qualité sonore digne du Velvet Underground au CBGB. Mais je ne me plains pas! D’autant que côté journal, y a plus une pige à tomber, même pas la moindre annonce de spectacle et le Progrès a supprimé les pages Temps Libres. Mais je ne me plains pas! Je supporte mon voisin qui nettoie sa terrasse au Karcher alors que j’ai même pas de balcon et que j’ai plus de chien à sortir. Mais je ne me plains pas!

«Évidemment, je pose ce soir des règles nouvelles. Nous posons des interdits. Il y aura des contrôles. Toute infraction à ces règles sera sanctionnée». Les forces de l'ordre et l'armée seront là pour surveiller nos déplacements et décider s’ils sont utiles ou pas. Avec des sanctions à la clef ?! Ça va pas être facile mais ça nous apprendra à faire les malins contre un ennemi invisible qui frappe si sournoisement. Merci, ami internaute, de me fournir les mots justes ! Les flics, je comprends bien qu’ils vont pouvoir nous verbaliser à vue si on n’a pas le laisser-passer bidon qu’on signe tout seul ou que le patron nous envoie ! Mais comment l’armée va-t-elle sanctionner les resquilleurs? A coup de bastos et de bazooka. La prune d’un côté, le pruneau de l’autre ! Après Vigipirate, voici Vigipiétons ! N’oubliez pas votre contrat de travail pour vos déplacements. Ça va pas être simple pour les ubers, les distributeurs de journaux, les témoins de Jéhovah, les dépressifs et les coureurs cyclistes professionnels.

Mais « Nous sommes EN GUERRE », imbécile de contestataire! c'est ce que président Macron a répété cinq ou six fois comme un plumitif de rhétorique qui découvre l’anaphore. Et que je t’invoque « l'union nationale », j’ai cru qu’on allait avoir droit à l’union sacrée. Tous derrière moi ! Les libertés individuelles sont en veilleuse, Charlie le retour! Les frontières ferment et le gouvernement va légiférer par ordonnances dès que le parlement lui aura donné le feu vert. Hop là ! Déjà que les députés en foutaient pas lourd… s’agiter, ça n’est pas être utile.

Le second tour des Municipales est reporté jusqu’à la fête de la musique. Olé! Heureusement à Dole, comme pour le virus, la municipalité sortante (enfin… plus tant que ça!) a pris les devants et on ne mélangera pas les genres. 

Mais il y a aussi de bonnes nouvelles: les réformes sont « suspendues », notamment la réforme des retraites. C’était bien la peine de nous faire tout ce foin avec un 49.3 juste avant la pandémie pour faire signer une loi à blanc !

Président Macron a fait un hommage appuyé aux services publics, au personnel du soin, de l’enseignement, aux pompiers ! Plus faux-cul, tu meurs ! Je n’insiste même pas tellement tout le monde aura admiré le retournement de veste quand il nous demande avec des trémolos dans la voix d’inventer de nouvelles solidarités… comme si les Gilets jaunes et les grévistes avaient attendu ses conseils qui sonnent faux, ses appels à la sagesse qui tombent à côté comme un chapelet de fausses notes. Et ça n’en finit pas ! Comme d’habitude, il en fait des tonnes (là, j’ai remis l’image!). Ma propre belle-mère ne comprenait plus où il voulait en venir: il faut organiser des choses avec ses voisins ou ne plus les approcher ? 

« Il ne faut pas que les fausses informations circulent à tout va. Evitez l’esprit de panique, de croire dans toutes les fausses rumeurs, les demi-experts ou les faux-sachants. La parole est claire, l’information est transparente.» Si ça ne venait pas d’un comédien sans talent ni empathie qui répète à loisirs qu’on est EN GUERRE et qu’il faut une mobilisation générale contre un ennemi invisible sur un ton grave et solennel surjoué, si ça ne sortait pas de la bouche d’un champion du tout et son contraire, du mensonge orchestré et de la contradiction disruptive, on ne demanderait qu’à le croire. 

Après toutes ces belles paroles, on attendait du concret… à part la répression préventive contre les récalcitrants infantilisés. Président Macron a gardé le meilleur pour la fin: 300 milliards pour… pour… ah, merde, pas pour l’hôpital et la lutte contre le virus. Non, des dérogations fiscales pour soutenir les entreprises. C’est que c’est peut-être pas le moment d’effacer des dettes qui foutraient les banques par terre. En d’autres termes, l’État paiera avec une somme vraiment conséquente d'argent public pour venir à la recousse du secteur privé. L'économie avant tout, business as usual. Les loyers, les impôts, les cotisations sociales et les factures d’eau et de gaz sont suspendus… mais pour les entreprises, pas pour les gens comme l’a cru ce brave Mélenchon qui est benoitement tombé dans le piège du flou linguistique. C’est les grosses boites qui vont bien s’en sortir entre le chômage partiel, le crédit d’impôt et l’élimination à la Schumpeter de la petite concurrence.

« Beaucoup de certitudes, de convictions sont balayées, seront remises en cause. Beaucoup de choses que nous pensions impossibles adviennent. » Eh bien, non, président Macron, y a rien qui change ! Vous nous prenez toujours pour des billes mais on a appris à se méfier ! Bien sûr, qu’on va être solidaires avec les malades, les vieux, les faibles, les soignants et tous ceux qui continuent à faire tourner la boutique pour réparer vos conneries. Même Buzyn a craqué ! Alors laissez agir les professionnels, les experts du soin, les vrais sachants ! Laissez une chance à vos préfets (Lallement excepté !) de se rattraper ! Allez vous calfeutrer avec votre blonde au fort de Brégançon ! Et dites à Castaner d’arrêter de bêler derrière son pupitre ! L’État, c’est nous et nous savons ce que nous avons à faire! Quant à vous, fermez-la !

 

Le texte intégral de cette intervention à vite oublier


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À propos de l'auteur(e) :

Christophe Martin

Passionné de sciences humaines mais d'origine bretonne, je mets mes études en anthropologie et mon humour situationniste au service de mon action politique et sociale.


Formateur dans l'industrie et pigiste au Progrès

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