Mode sombre

Ce titre est assez mauvais et respire le film catastrophe jurassico-américain mais il s’inspire du nom d’une plateforme que des parlementaires (oh oh !?) ont mis en place depuis trois jours, une plateforme « pour soumettre au débat public nos premières pistes de solutions et pour permettre à tous de contribuer et de les enrichir. » La déclaration d’intentions est un modèle de clichés de la bien pensance. « Cette crise nous aura tous transformés. Elle a violemment révélé les failles et les limites de notre modèle de développement, entretenu depuis des dizaines d’années. Elle nous rappelle le sens de l’essentiel : notre souveraineté alimentaire, notre besoin de sécurité sanitaire européenne, notre production locale pour des emplois de proximité, le besoin de relever les défis environnementaux, de réapprendre à vivre en concordance avec la nature, de réinventer le lien social et le vivre-ensemble, de développer la solidarité? internationale plutôt que de favoriser le repli sur soi. » Et cerise sur le pompon, « il nous faudra réapprendre la sobriété, la solidarité et l’innovation. » Comme si on les avait attendus pour être moins cons… Je vous passe les détails du truc mais on sait d’avance que, venant de ceux qui ont laissé advenir tout ce merdier ultralibéral sans élever le ton, ça ne servira à rien qu’à donner l’illusion d’une démocratie participative 2.0 et ça finira aux oublinettes.

Comme, parmi les signataires, figure Barbara Pompili, députée LREM de la Somme, également la présidente de la Commission du Développement durable et de l'Aménagement du territoire dont le député Jean-Marie Sermier est un des quatre vice-présidents depuis 2012, je me suis dit avec une certaine mauvaise fois je dois l’admettre : « Tiens, est-ce que Barbara aura téléphoné à son collègue Jean-Marie pour qu’il s’embringue dans une telle usine à gaz? »

J’ai donc été consulter la liste qui démarre très mal par l’imbuvable et très contournable Éric Alauzet mais de Sermier, que nenni ma foi ! On ne va pas non plus lui en vouloir de ne pas participer à cette mascarade nationale fait sur le même modèle que bon nombre de plateformes citoyennes qui ont vu le jour ces dernières années. Mais enfin… de la part de quelqu’un qui s’occupe de développement durable à l’Assemblée nationale, on aurait pu s’attendre à ce que… mais peut-être prépare-t-il, entre deux appels le jeudi entre 14h30 et 17h00 sur rendez vous et une collecte de draps pour faire des blouses pour l'hôpital, une intervention tonitruante pour la réouverture du bouzin parlementaire. Qui sait ?!

Qu’on ne se méprenne pas ! Je n’ai rien contre le principe de la plateforme participative et consultative. on peut y fabriquer de l'intelligence collective. J’irai peut-être même faire mon marché sur celle-ci. Mais j’en ai après ses promoteurs institutionnels. On ne peut pas compter sur ceux qui nous ont mené au ras du gouffre (et je suis volontairement en deçà de la réalité) pour changer grâce à la crise. La stratégie du choc nous emmène vers encore plus d’autoritarisme pour tout reprendre comme avant et en pire. Une véritable prise de conscience n’est pas une affaire de jours surtout quand on est dans le confort bourgeois à envisager de « réapprendre la sobriété » et à "s'interroger sur l'essentiel". Quand je me suis arrêté de picoler, je ne suis pas allé prendre l’apéro avec les élus du vin d’honneur (même bio) pour leur demander conseil. J’en ai chié longtemps et ça me démange encore parfois. Mais c’était le moment où jamais. Comme ce le sera pour nous à la sortie du confinement de renvoyer, de gré ou de force, tous ces incompétents assassins bouffer ce qui restera de leur rente, barricadés dans leurs sanctuaires blindés parce qu’il ne fera pas bon pour eux de venir se pavaner en ville quand on occupera à nouveau la rue. Qu'on se le dise et qu'on nous lise !


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À propos de l'auteur(e) :

Christophe Martin

Passionné de sciences humaines mais d'origine bretonne, je mets mes études en anthropologie et mon humour situationniste au service de mon action politique et sociale.


Formateur dans l'industrie et pigiste au Progrès

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