Virus « militantus »
Je crois que c’est Coluche qui disait : « Croire en Dieu, ça sert surtout à mourir ». Ainsi, la croyance rassure, elle prémunit du néant et nous promet un nouveau voyage à la place d’un arrêt brutal de l’arbitre. Il en est de même pour toutes les croyances : elles luttent contre l’angoisse. C’est un élément de confort.
Attention, ne confondons pas « convictions » et « croyances ».
Les convictions sont les rares certitudes qui peuvent guider une existence : la défense de la justice, de l’égalité, de la liberté... ou le contraire : les « riens et riennes », « les imbéciles et les zélites sachantes » et même « il y aura toujours des riches et des pauvres ».
La croyance, c’est autre chose, c’est l’investissement de l’espoir : le paradis (pas forcément avec 72 vierges!), le sauveur suprême ou même les élections. Et quand tu crois, tu veux que les autres y croient aussi pour faire avancer la cause...
Ton énergie se mobilise alors pour convaincre, c’est le stade de la catéchèse, de la mission car la croyance suppose une vérité à répandre. Et de se désoler du nombre toujours trop important des mécréants en tous genres... Ces endormis ne comprennent pas qu’en étant tous « unis » derrière la bannière (la leur) nous pourrons faire advenir les lendemains qui chantent. Quitte à faire aussi œuvre de propagande séductrice, quitte à vouloir se battre sur le même terrain que l’ennemi qu’on appelle ainsi adversaire...
Las, on nous a tant vendu de mirages et de promesses que l’élan pour rallier une quelconque croyance est brisé.
Et au lieu de s’interroger sur le désintérêt général, le missionnaire accuse, enrage et généralement nous engueule.
Parce que, dans la croyance, le doute n’est pas permis.
« Le doute et la question sont pourtant au fondement de la réflexion... », dixit mon copain Martin dans un de ses derniers billets.
Ma longue expérience militante m’a appris que la réflexion n’est pas le nerf actif des partis ou chapelles. Les questions ne sont pas beaucoup à l’honneur, elles sont plutôt sujettes à sanction. Ainsi est née et a été nourrie une manière de procéder qui fait du débat une occasion de se taire et du parti ou de l’église un organe de pouvoir.
Et toute une cohorte de sincères militants fonctionnent depuis des lustres comme des missionnaires et ont répandu un vilain réflexe de vieux soldat : invectiver et tenter de disqualifier plutôt que débattre en questionnant.
Cette pratique de l’emprise à la place de l’altérité n’est pas une question d’âge ou de vieux croûtons revendiquant leur ancienneté (même si ça existe !). Elle a des adeptes dans toutes les classes d’âge, (même chez les plus jeunes).
Je me demande si c’est la résurgence de l’individu grégaire se sentant menacé ou bien le symptôme de notre société très individualisée.
Ainsi on caricature le messager plutôt que de causer du message, on stigmatise avec des mots couperets dans le genre « mécréants », « fascistes », « conspis » ou « complotistes », et le tour est joué : on est heureux de lui avoir rivé son clou et de nager dans sa vérité.
Dieu merci (c’est pour rire!) il existe des espaces de débat, donc de réflexion qui nous permettent de mettre à l’épreuve nos convictions et les moyens d’essayer de les vivre et les mettre en œuvre.
J’ai tellement de reconnaissance pour tous ceux et toutes celles qui nourrissent et ont alimenté mes neurones et mon cœur et qui m’aident à évoluer et à me battre dans ce monde connecté et complexe.
Nous devons toujours préserver la possibilité de remettre en question tous les pouvoirs.
Quand aux scotchés de la vindicte, je me détourne et je suis mon chemin. Ça me repose.
L’irrévérencieuse
À propos de l'auteur(e) :
L'irrévérencieuse
Rombière réfractaire et iconoclaste, sage comme un orage et qui puise ses forces dans la fraternité.
Militante
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