Politique

Requiem pour un édito

Publié le 22/04/2021 à 10:14 | Écrit par Christophe Martin | Temps de lecture : 04m38s

 

« Bientôt un impôt mondial contre les paradis fiscaux ? » C'est pas moi qui pose la question, c'est Ouest-France, le journal le plus faux-cul de l'ouest... faut dire qu'à part le tout petit Télégramme du côté de Brest, y a personne d'autre que la fifille du père Hutin pour faire l'opinion en Bretagne, Normandie et Pays de Loire. Un empire catho-libéral bien pensant avec des éditos plus creux les uns que les autres mais toujours dans la droite ligne du pouvoir capitaliste. Et là, nous sommes le lundi 19 avril, c'est Dominique Seux qui signe, pas ce gros titre que je garde pour le dessert, mais l'édito en hors-d'oeuvre. Je me réjouis d'avance. Seux, c'est le directeur des Echos (financé par Bernard Arnault et nos impôts, via les subventions à la presse écrite) et sur France-Inter (financé par notre redevance audio-visuelle), c'est la voix de l'économie orthodoxe. Bref, Ouest-France (financé par les lecteurs, la pub et nos subventions) envoie du lourd pour un lundi matin.

Je vous résume le propos du benêt ultralibéral : les Etats-Unis sont un modèle d'ascenseur social et notre Dominique de citer les exemples de Jeff Bezos (Amazon), Albert Bourla (Pfizer), Satya Nadella (Microsoft Team's), Dara Khosrowshahi (Uber), bref... que des entreprises qui « font beaucoup parler d'elles dans cette si longue et si douloureuse crise du coronavirus ». Qui font parler et qui surtout profitent de la situation. Faut pas avoir honte, Dominique, on nage dans le capitalisme dérégulé, y a pas de honte à faire du blé dans la débâcle générale. Au bord des routes de l'exode, y avait déjà des commerçants français qui avaient augmenté leurs prix. Mais je m'égare car Dominique Seux ne cherche qu'à vanter le cosmopolitisme américain qui donne sa chance à tous ceux qui méritent leur place sous les feux du capital outrancier. Sauf que, sauf que... mon p'tit Domi, tes quelques exemples ne font pas le compte. Sors de chez Forbes et va enquêter sur le terrain, là où ça coince, c'est à dire dans l'Amérique des oubliés de l'American way of easy life. Ensuite tu reviendras nous donner des leçons pour la France où il est vrai l'ascenseur social est en carafe et l'escalier de secours en feu. Mais qu'est-ce que tu vas nous chanter les louanges de Carlos Ghosn, Dominique ? Un super escroc mégalomane qui ne fait honneur ni au Brésil ni au Liban ni à l'espèce humaine. Et qu'est-ce que tu vas tirer le tapis rouge pour Tidjane Thiam, une grosse tête polytechnico-ivoirienne, qui sort major de l'école des Mines pour découvrir benoitement le racisme des bourgeois, mondialistes sur le papier mais tout ce qu'il y a de plus sectaires dans la grande famille ? Honnêtement qu'est-ce qu'on en a à secouer de l'origine ethnique ou social des trous de balle qui ne cherchent qu'à faire du blé grâce aux vaccins, au confinement et à l'exploitation humaine ? Que Bezos soit le fils adoptif d'un cubain immigré (comme Tony Montana) ne change rien à l'affaire Amazon. Que Corleone, Luciano et Capone aient été d'origine italienne n'arrange en rien leur cas de meurtriers et leaders de la pègre ! Reviens sur terre, Dominique ! Que des migrants et des pauvres s'en sortent malhonnêtement grâce à leur avidité et leur âpreté au gain n'a rien de rassurant et ne constitue en rien un exemple pour qui que ce soit, à moins de se coucher devant le fric.

Alors Dominique Seux, tu ranges ta copie et tu retournes à ta morale de winner à la mords-moi l'noeud. On n'en veut plus des milliardaires d'où qu'ils viennent, et franchement en France, on a assez de start-uppers made in Neuilly à réinitialiser pour ne pas avoir besoin que des étrangers viennent grossir leurs rangs.

Que ceux qui fuient leur pays en guerre, en proie à la corruption ou grillé par le soleil, soient les bienvenus au cœur de notre nation avec la volonté d'apporter leur pierre à l'édifice national, pas de soucis ! Mais s'ils viennent ici pour se remplir les poches comme Carlos Ghosn, autant qu'ils tentent leur chance aux States. Franchement, ils ne vont pas nous manquer. Ici, on a autre chose à faire qu'à promouvoir des apprentis-capitalistes, plébisciter des éditorialistes aux ordres de la ploutocratie et encore espérer quelque chose de ce modèle corrompu.

Alors, mon petit Dominique Seux, je ne sais pas combien tu as touché pour tes recherches sur Wikipédia mais tu mérites tout juste une bonne claque dans la gueule et une nouvelle paire de lunettes et on va te les offrir plus tôt que tu ne le crois, à toi et à tes idées méritocrasseuses.

Et pour en finir avec ce gros titre à la con, comment peut-on souscrire à une idée aussi stupide ? « Bientôt un impôt mondial contre les paradis fiscaux ? » Taxer les receleurs, fallait y penser. Prendre un pourcentage sur l'argent détourné, ça, c'est du grand art. Une idée à laquelle Biden donne le coup de pouce nécessaire ? J'en suis pas surpris. Il se prend pour Teddy Roosevelt et nous joue le New Deal saison 2. On va donc moraliser l'évasion fiscale, faire payer à la marge les prédateurs économiques, redonner un semblant de respectabilité à un système pourri et les béni-oui-oui de Ouest-France se réjouissent. Alleluiah, y a du mieux ! Du mieux dans le pire ! Mais comment peut-on croire que le porte-flingue de Wall Street va tirer dans le dos de ceux qui l'ont hissé à la Maison Blanche. Ça va pas la tête ?! Et quand on nous parle d'une soudaine prise de conscience de Jojo Sleepy Biden, laissez-moi rire. Les fortunes accumulées ne changent pas de poches. En fait, elles gonfleront un peu moins vite jusqu'à ce que les experts-comptables trouvent un nouveau truc. En France, c'est déjà fait : Macron et sa bande cherchent à en finir avec les contributions à la Sécu. On nous amuse d'un côté pour mieux nous entuber de l'autre. Derrière un « impôt révolutionnaire » annoncé à grand bruit dans la presse, le capital continue son œuvre de destruction massive, notamment en passant par la case verte pour se donner bonne conscience. Mais ni la Covid-19 ni la fonte des glaces ne les arrêteront : les capitalistes sont des psychopathes du fric et nos morts, ils s'en battent les « stakes » depuis trois siècles. A ne pas le clamer haut, fort et à longueur de une, les médias mainstream sont complices. A continuer à croire à leur possible rédemption (virage communiste volontaire?), nous les encourageons à poursuivre le massacre.

 




À propos de l'auteur(e) :

Christophe Martin

Passionné de sciences humaines mais d'origine bretonne, je mets mes études en anthropologie et mon humour situationniste au service de mon action politique et sociale.


Formateur dans l'industrie et pigiste au Progrès

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