Mode sombre

Blanchette Cottet nous a confié ses émotions fortes après un spectacle à l’opéra de Lausanne.

« Dès l’ouverture, j’ai ressenti la vigueur de la battue du chef, son rythme, il était bien parti pour me donner des frissons. Et ça s’est confirmé tout au long de ce premier acte ! Tour à tour délicat, se bornant à un léger accompagnement de sa baguette, ou quand il le fallait, énergique, presque brutal dans les moments forts. Avec plein d’inventions, de surprises, de délicatesse. On était loin du ronronnement de chefs routiniers ! Au deuxième acte, quand l’héroïne supplie à genou, le chef comme en transe, les yeux fermés, sa baguette vibrant à peine, j’ai retenu mon souffle comme tétanisée!

Puis vint le prélude de l’acte 3, la célèbre chevauchée. Là je me suis surprise à la rythmer comme si je fouettais une monture imaginaire pour qu’elle accélère encore. Quelle cadence infernale ! J’ai été prise d’une émotion qui venait du plus profond de moi, j’ai dû prendre un mouchoir, je ne pouvais plus me retenir. Ah que c’était bon ! Après, je me suis retrouvée comme dans un état second, apaisée et épuisée. J’ai mis mes mains sur mes yeux pour cacher leur rougeur. Comme dans un rêve, j’imaginais que la baguette magique vibrait encore. Quel Chef ! Comment se passer de sa musique ! »

Pas de doute. Notre amie Blanchette est mélomane.

Mais elle est aussi attentive à la situation politique de son pays et du monde. Elle nous livre un billet d’humeur sur une autre forme de ruissellement au sens imagé celui là : La « théorie » économique du ruissellement. Une pluie d’or ?

« L’élucubration du ruissellement c’est « Ah chic, les riches sont de plus en plus riches ! On va tous en profiter ! » Quel culot !

Certes, dans  mon propre pays, qui n’est « pas au dessus de tout soupçon », un paradis fiscal comme le dénonce Jean Ziegler, oui, dans une certaine mesure, une part des trafics financiers ruisselle sur nous. Il suffit de comparer la qualité de notre habitat, le niveau des salaires mais aussi des prix pour s’en convaincre. Ce qui nous permet d’attirer des médecins, des infirmières, des  enseignants, et une foule de frontaliers, formés en France mais où ils sont payés au lance-pierre. Vous faites de même avec les pays africains et d’une certaine façon, ceci dit sans vouloir vous vexer,  vous êtes un peu notre Afrique à nous. 

La contrepartie de cette relative prospérité, c’est l’oppression, les spoliations des autres peuples qui ont permis d’accumuler les richesses.

En remontant le fil de l’histoire, nos amis belges ne sont pas en reste : les somptueuses maisons art nouveau de Bruxelles, c’est le Congo belge !

Et plus loin encore, les somptueuses maisons « du quai des Chartrons » à Bordeaux, sont le fruit du commerce triangulaire. C’est «peu», très très peu, enseigné en France  l’hypocrisie allant jusqu’au classement par l’UNESCO sur la liste du patrimoine mondial de l’humanité, du deuxième port négrier de France, après Nantes !  Un beau tour de passe-passe avec l’histoire !

Enfin, je rappelle à mes amis français, en m’excusant de rappeler ces drames à mes chers voisins du Jura, que la fin de la construction du château de Versailles coïncide avec le pillage de la Franche-Comté par Louis XIV (autour du traité de Nimègue 5 février 1679),

Accumulation de richesses d’un coté ?  Privations, spoliations, esclavage de l’autre !

Dans la pseudo « théorie du ruissellement», ce n’est pas l’or mais la sueur qui ruisselle ! »

Blanchette Cottet, décembre 2021


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