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Des brèves et des pas longues

Publié le 06/12/2023 à 19:51 | Écrit par La Rédac' | Temps de lecture : 04m51s

Voici des brèves parues dans la version papier  de novembre toujours disponible chez Mumu, la Fleur de sel, place aux Fleurs, Dole. L'édition de décembre sortira ce vendredi 8 décembre.

PAS DE POTENCE POUR SYLVAIN GIBEY.- Sur un plan personnel, Sylvain  Gibey, chef des urgences de l'Hôpital Pasteur, nous était jusque là plutôt sympathique. Devant le tribunal correctionnel de Lons-le-Saunier, il comparaissait pourtant le mois dernier pour escroquerie à l’encontre d’un organisme chargé d’une mission de service public, la Trésorerie hospitalière du Jura qui ne s’est même pas constituée partie civile, la bonne fille  ! Il faut dire que notre toubib n'a pas «  compté ses heures  » entre 2017 et 2021: chef de pôle par ci et président par là, dix fonctions au total pour 5  614 d’heures injustifiées, et en gros 214  000 euros selon les estimations des enquêteurs. Un cumulard de première, le chef des urgences  !   Il estime que 80 % de son temps de travail était consacré à des tâches extra-médicales. Un cas d'école du bullshit job, cher à David Graeber  : absent ou pas, à l'étranger ou sur site, personne ne fait la différence. La défense de Sylvain Gibey a été pour le moins pathétique et foireuse et le tribunal a dû se résoudre à le déclarer coupable  : six mois avec sursis et une amende de 5  000 euros, soit même pas 1 euro par heure de vol. Gageons que le miraculé ne va pas faire appel. Luigi Pastor.

MIRACLE D’HALLOWEEN.- Ce 31 octobre, le petit chat est mort. Heureusement, il s’est rétabli depuis. Uhm.
ADIEU L’AMI.- Ce 28 octobre, Matthew Perry, alias Chandler Bing dans la série culte Friends, est mort à l’âge de 54 ans. Malheureusement, il ne s’est pas rétabli depuis. Uhm
POST SCRIPTUM.- Si vous trouvez que mes articles sont nuls, vous pouvez toujours nous envoyer les vôtres… Uhm. 

PPS.- Un mot encore. Difficile de savoir quoi dire de pertinent au sujet de toutes les saloperies qui se passent dans le monde. Une énième tribune indignée ne changera rien. Un ton décalé risque d’être mal pris. Je cours le risque. On ne peut compter que sur nous-mêmes pour essayer de contrer les fous furieux qui mènent notre monde à la ruine. Tâchons au moins de ne pas sombrer dans la haine et le découragement. Uhm.

CHATEAU MACRON.- Villers-Cotterêts, un nom qui sonne bien pour les amateurs d'histoire de la langue française puisque c'est là qu'en1539, François  1er signe une ordonnance générale pour la police et la justice, 192 articles au total dont on n'a retenu qu'une poignée. Les articles 50 à 54 intiment aux curés d'enregistrer les baptêmes et les décès  : il confie ainsi à l'Église l'embryon de l’état civil. Mais surtout avec les articles 110 et 111, lordonnance de Villers-Cotterêts impose la rédaction des actes officiels et notariés en «  langue maternelle française  ». Exit le latin. C'est pourquoi le texte est aujourd'hui considéré comme fondateur de la primauté et de l'exclusivité du français dans les documents de la vie publique. Sauf qu'à l'époque seule une petite minorité des habitants du royaume parlait le français. Et même si l'objectif de l'ordonnance était de rendre les sentences de justice et les actes notariés intelligibles par tous, on est encore loin du compte aujourd'hui en ce qui concerne les textes officiels. Mais si je vous parle de tout ça, c'est parce que Macron vient d'inaugurer sa Cité internationale de la langue française dans le château. L'outrecuidant s'imagine que l'histoire retiendra de lui l'inauguration de ce «  lieu de culture vivante  ». Faut-y être con  ! L'image de la France n'a jamais été aussi salie dans toute la Francophonie (Afrique, Proche-Orient), sans oublier son influence qui se racornit à chaque fois que Macron l'ouvre, ce qui aura à plus ou moins long terme l'effet de faire reculer le nombre de francophones à l'étranger  : pourquoi parler la langue d'une petite puissance déclinante, vouée à patauger dans le sillage boueux des États-Unis  ? Alors on peut bien discutailler sur l'écriture inclusive au Sénat, le vrai problème du rayonnement culturel de la langue française est à une autre échelle  : le français a longtemps été la langue de la diplomatie et, accessoirement celle de la Charte des Droits de l'Homme. Il est donc grand temps de laisser le bizness des armes et de la merde en boite au globish (global english) et de redonner à notre langue la saveur de la démocratie et de l’innovation politique. Le meilleur cadeau que Macron puisse faire à la langue française, ce serait donc de fermer sa gueule. Martial Proust.

RETOUR A L'ENVOYEUR.- Vers 1917, René-Victor Fournier, gouverneur colonial en Afrique, «  collecte  » un masque fang, celui d’un maître Ngil, c’est-à-dire d’un magistrat d'une société secrète: lorsqu’il y avait des crimes ou des péchés commis par des habitants au Gabon, l'un des frères Ngil revêtait le masque pour rétablir l’ordre, la justice et la vérité. C'est donc le masque d'un justicier. La différence entre un magistrat et un justicier, c'est sa légalité en fin de compte  : quelle que soit sa légitimité un justicier est un hors-la-loi, ce qui était le cas des Ngil sous la colonisation. Bien sûr, les autorités coloniales tentaient de persuader les populations que ces pratiques étaient révolues et que la véritable justice émanait de l’État. Les colons en profitaient pour confisquer les masques et c'est ainsi qu'à la mort du fonctionnaire Fournier en 1931, ce masque s'est retrouvé dans l'héritage. Inconscient de sa valeur sur le marché, son petit-fils, un vieux gardois de 86 ans qui nettoie sa résidence secondaire, le bazarde pour 150 euros à un brocanteur qui a la bonne idée de le faire expertiser. Bingo  ! L'objet date du XIXème et le 26 mars 2022, à l’Hôtel des ventes à Montpellier, il est mis à prix à 300 000 euros et part pour 4,2 millions dans la collection d'un anonyme. Sauf que l'héritier Fournier se sent spolié et attaque le broc' pour tromperie alors que celui-ci proclame sa bonne foi. Mais ce n'est pas tout  ! Le Collectif Gabon Occitanie entend bien récupérer le masque au nom du peuple Fang  : même ancien, le fruit d'un vol reste un vol et l'objet cultuel doit revenir à ses véritables détenteurs. Du côté du dernier acquéreur, on prétend que le grand-père Fournier avait acquis le masque tout ce qu'il y a de plus légalement  : on peut en douter car les Fang ne sont pas du genre à céder un tel objet investit d'un pouvoir qu'il semble toujours détenir. En attendant, personne ne profite du masque Ngil qui attend justice dans un tiroir. Mallory Binga.




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