Écologie

"Une parcelle n'ayant plus d'intérêt particulier pour la collectivité", vraiment?

Publié le 24/09/2024 à 17:49 | Écrit par Nicolas Gomet | Temps de lecture : 03m15s

La vente par la ville d'une parcelle de 647 m2 à 3€/m2 a été mise en délibération du Conseil municipal au lendemain de la fête nationale. Ce terrain pentu et arboré au bord du Doubs, abrite un chemin piéton qui donne accès au Doubs depuis la rue de la Résistance, ainsi qu'à une source s'écoulant de l'anfractuosité de la roche. Ouvert au public depuis 1826, il avait été fermé après l'effondrement d'un mur de pierres qui l'a recouvert  partiellement et qui menaçait de tomber par ailleurs.

La délibération de la vente passée durant l'été, comme les lois impopulaires le sont à l'Assemblée nationale, a failli passer inaperçue. Celles et ceux qui connaissaient ce lieu d'intérêt, mais plutôt méconnu, pouvaient penser sa réouverture proche après trois ans d'interdiction. La découverte du projet de délibération par les conseillers municipaux, cinq jours avant son vote, les a donc stupéfaits. Plutôt que d'avoir entrepris de le résoudre, la Municipalité se débarrasse d'un problème en bradant les biens communaux! Etudiant le dossier, il s'est avéré que cet intérêt était partagé collectivement, et même institutionnellement, puisque le chemin était protégé dans le Plan Local d'Urbanisme Intercommunal, mis à jour récemment. Pourtant, comme quand la ville se sépare d'une simple bande de pelouse pour élargir le chemin d'un riverain, la délibération justifie la vente par le fait que la parcelle n'a plus d'intérêt particulier pour la collectivité...

Après l'envoi d'un courrier au maire pour lui demander de trouver une solution pour maintenir cet accès;

Après l'alerte donnée à la Préfecture pour signaler la non-conformité de la délibération au plan local d'urbanisme; 

Après les échanges avec le représentant d'une association du quartier pour l'avertir et connaitre sa position;

Après l'envoi d'un courrier en recommandé par un riverain, pour signifier au maire son désaccord pour des raisons juridiques et historiques; 

... le silence fut la seule réponse. Un tractage et une réunion d'information ont été improvisés fin août, par des élus  opposés à cette décision. Quelques-uns des témoignages entendus lors de ces échanges sont relatés ci-dessous. 

M. H. ne voit pas pourquoi la mairie n'a pas contraint le propriétaire du mur effondré à faire les réparations pour rendre le chemin praticable, alors qu'elle en a le droit. Il l’avait été dans un cas similaire quelques années auparavant et il avait fait les travaux. 

Mme A. se dit très affectée par la disparition de cette accès à la source. Son mari, décédé, y faisait tremper les osiers avant de les tresser en paniers. C'est de l'eau bien douce qui convient pour ça, ajoute-t-elle. 

M. E. s'interroge. Pour lui, la fermeture du passage pour des raisons de sécurité en 2021 aurait dû être suivie de travaux pour sa réouverture. La ville n'a donc rien fait dans ce sens pendant trois ans? Et c'est comme ça que ça finit?

Mme N., qui s'est présentée en disant ouvertement qu'elle soutenait habituellement l'action de la municipalité, est opposée à cette vente et ne comprend pas que la mairie n'ait pas consulté les habitants. La municipalité n'en a pas parlé quand elle a posé son chapiteau dans le quartier il y a un an et demi, et il n'y a rien eu depuis, alors que les élus viennent régulièrement aux animations du quartier. Il y a un double discours.

Pour M. S., il est également question de la vie du quartier, mais au-delà, la Ville brade le patrimoine commun: le chemin appartient à tous les Dolois, et le brader est honteux. 

Certains Azanais présents ont fait part de rumeurs venant de la mairie indiquant la "suspension de la vente". Ce qui ne veut pas dire grand chose. Il est vrai que tant que les actes ne sont pas signés, l'acheteur ou le vendeur peuvent se rétracter. La Préfecture peut aussi émettre un avis négatif pour la délibération. Ou il peut s'agir d'endormir la vigilance des riverains récalcitrants et autres pétitionnaires. 

Ce chemin défendu par les habitants et protégé par le PLUI, a subi le pourrissement d'une situation qui n'aurait du être que temporaire. Ce petit patrimoine atypique doit être sécurisé, préservé et mis en valeur plutôt que d'être cédé pour la moitié du tarif d'un simple espace vert. 




À propos de l'auteur(e) :

Nicolas Gomet

Scientifique polyvalent et explorateur des institutions locales.


Élu écologiste au conseil municipal de Dole

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