L'extrême-droite teste ses méthodes de communication et de provocation
Depuis plusieurs mois, la ville de Dole est le théâtre d’actions ciblées par le groupuscule d’extrême-droite Nemesis, se présentant comme « féministe » tout en diffusant des discours transphobes, racistes et nationalistes radicaux. Sous couvert de patriotisme, ses membres mettent en place des opérations de communication calculées, destinées à provoquer des réactions, générer du contenu viral, et cibler des opposants. Retour sur une stratégie bien rodée, révélée lors d’un incident survenu le 4 septembre dernier.
Une implantation locale masquée par des symboles nationaux
Déjà repéré lors du festival Cirques et Fanfares, le groupuscule Nemesis tente de s’implanter discrètement à Dole. Ses membres y ont notamment affiché des banderoles depuis un appartement en centre-ville, et multiplié les apparitions ciblées dans l’espace public.
Le 4 septembre, la porte-parole bisontine du mouvement a été vue déambulant dans les rues avec plusieurs drapeaux français, filmée par son compagnon dolois et accompagnée d’un tiers adoptant un comportement de garde rapprochée. Des passants ont tenté d’interpeller verbalement les militants, entraînant une confrontation filmée, montée et diffusée sur les réseaux sociaux du groupe.
Vidéos, désinformation et mise en scène de la « victime »
La vidéo diffusée met en scène la militante se présentant comme victime d’un « gauchiste qui arrache un drapeau français ». Un récit simplifié, hors contexte, qui nie totalement les motivations politiques des militants et le fait que le drapeau avait été illégalement accroché à la collégiale, un bâtiment classé.
Le montage joue sur l’émotion, la colère visible d’un opposant est exploitée pour légitimer la diffusion, sous prétexte de « consentement » donné sous l'effet de la colère, loin du réel consentement libre et éclairé dont toute féministe devrait connaître la définition. La publication, largement relayée sur TikTok et Instagram, a déclenché une avalanche de commentaires haineux : insultes, menaces de mort, appels à la milice et à la guerre civile. Beaucoup viennent de masculinistes déversant des propos misogynes, bien loin du féminisme assumé par la porte-parole.
Plus troublant encore, ces réactions viennent de toute la sphère internationalisée de l’extrême-droite : France, Espagne, Pologne, Italie, mais aussi Brésil, Argentine ou États-Unis. Cela n'est pas si étonnant puisque l'action prévue initialement par la porte-parole semblait reprendre les codes du mouvement international « Raise the Flag », campagne inspirée d’actions de droite radicale américaine incitant les sympathisants à afficher le drapeau national dans l’espace public pour revendiquer un attachement à une vision nationaliste, souvent xénophobe, de l’identité. L’objectif est autant de s’affirmer que de provoquer. Un réseau de solidarité de l'extrême-droite qui contraste fortement avec l’isolement souvent vécu par les militants antifascistes ciblés.
Une stratégie de haine bien huilée
Le fonctionnement est désormais bien connu : une action filmée dans l’espace public, une provocation assumée, des réactions filmées, montées, sorties de leur contexte, puis diffusées pour alimenter l’indignation dans les cercles d’extrême-droite.
Cette stratégie utilise peu de moyens — un simple téléphone suffit — mais un levier puissant : la réactivité émotionnelle. Chaque séquence devient un outil de recrutement, de propagande, et de ciblage personnel. Dans ce cas précis, l’un des opposants identifiés a vu son nom et sa ville diffusés, et a subi menaces et intimidations dans la rue.
Comprendre pour résister
Les mouvements d’extrême-droite, comme Nemesis, maîtrisent parfaitement les codes de la communication virale, et savent tirer parti de chaque interaction pour renforcer leur narratif victimaire. Derrière une façade féministe ou patriotique, ils véhiculent un message profondément excluant et haineux.
Face à cette stratégie, la vigilance collective est essentielle : savoir repérer les manipulations, éviter de se laisser entraîner dans des mises en scène, et surtout, créer des formes de résistance qui ne tombent pas dans les pièges tendus.
Les fascistes s'organisent, à nous de réagir à la haine qui se met en place et dont, vraisemblablement, nous avons du mal à prendre la pleine mesure.
UnchainedDuck.
Article mis à disposition selon les termes de la Licence
Creative Commons Attribution - Pas d'Utilisation Commerciale - Pas de Modification 4.0
International.
À propos de l'auteur(e) :
La Rédac'
Donner la parole à ceux qui ne l'ont pas, voilà une noble cause ! Les articles de la Rédac' donnent le plus souvent la parole à des gens que l'on croise, des amis, des personnalités locales, des gens qui n'ont pas l'habitude d'écrire, mais que l'on veut entendre...