Politique

Pour ne pas oublier Allende

Publié le 23 déc. 2021 à 13:45 | Écrit par
Christophe Martin
| Temps de lecture : 02m19s

Si je ne devais retenir qu’une seule chose de l’élection de Gabriel Boric au Chili, c’est une promesse de juillet 2021 : « Si le Chili a été le berceau du néolibéralisme, ce sera aussi son tombeau ». Rappelons qu’à la chute d’Allende, en 1973, le gouvernement putschiste de Pinochet installe un régime non seulement autoritaire mais résolument néolibéral et le pays va devenir une éprouvette à ciel ouvert pour une expérience économique qui se révèlera désastreuse pour l’immense majorité des Chiliens. Et cela n’a été possible que parce que la junte a fait régner la terreur sur le pays. Ce qui est tombé à ces dernières élections, c’est donc non seulement un régime fasciste mais également le mur néolibéral qui bouchait tout espérance à une grosse partie de la population. En France, c’est le prix de l’essence qui a fait sortir les Gilets jaunes sur les ronds-points. Au Chili, c’est le prix du billet de métro qui a mis le feu au lac. L’expérience néolibérale, soutenue par l’oncle Sam, s’est révélée désastreuse, notamment au niveau des retraites par capitalisation privée et individuelle. Voilà ce qui nous attend en France à plus ou moins long terme avec n’importe quel candidat à teinte libérale. Au Chili, la santé, l’éducation, l’eau, le cuivre sont passés aux mains du privé. «Autant d’État que nécessaire, autant de marché que possible» était la devise du pouvoir de Santiago. Autrement dit, l’État assure le bon fonctionnement du marché, la machine économique tourne à fond les ballons avec des nuisances écologiques catastrophiques pour les populations et les actionnaires des grosses entreprises empochent. Les inégalités sociales se sont creusées. Et la cocotte-minute a fini par exploser malgré une répression musclée. L’opposition n’a pas lâché l’affaire et voilà que Gabriel Boric apporte une grosse bouffée d’espoir non seulement aux Chiliens mais un peu partout où on souffre du néolibéralisme (un état fort pour assurer des rentes maximales aux capitalistes). On va donc observer le Chili de près en espérant que la vapeur va définitivement s’inverser dans le bon sens et que l’administration Biden va se tenir à l’écart. Y a rien de moins sûr. En 1970, Nixon demandait explicitement au directeur de la CIA Richard Helms de renverser le régime démocratiquement élu de Salvador Allende. Trois ans plus tard, c’était chose faite. L’Histoire repasse souvent les plats mais j’ose espérer que Biden va être trop préoccupé par ses déboires intérieurs pour trouver le temps de garder une aile trop protectrice sur l’Amérique latine. Par ailleurs, Boric a rassemblé une gauche qui n’est pas uniquement radicale: il va falloir composer avec. A quoi ressemble le centre gauche chilien? Pas au nôtre, je l’espère mais je doute qu’une sortie du capitalisme soit sur le point d’advenir. Réparer un peu les dégâts, ce serait déjà pas mal. On verra ça à partir de mars prochain. Et on souhaite bon courage à tous les Chiliens de bonne volonté.



À propos de l'auteur(e) :

Christophe Martin

Passionné de sciences humaines mais d'origine bretonne, je mets mes études en anthropologie et mon humour situationniste au service de mon action politique et sociale.

Formateur dans l'industrie et pigiste au Progrès
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