Ciotti, sors de ce corps!
Sénateurs et députés LR, avez-vous donc une A.M.E? C’est la question que je me suis posée le 18 novembre dernier, lors des 35èmes rencontres de la Coordination Nationale des comités de défense des hôpitaux et maternités de proximité. Avant l’intervention du pédopsychiatre Charles-Olivier Pons, la députée Justine Gruet a lu, avec pas mal de bafouillis, un petit speech au fort parfum de libéralisme allant jusqu’à lâcher une expression particulièrement malheureuse (ou provocatrice) devant une assemblée qui défend le service public du soin: « LE PIÈGE DE LA GRATUITÉ ». « On dit que ce qui n’a pas de prix n’a pas de valeur. (…) Cette politique de la santé gratuite a conduit à la pénurie de l’offre, à sa perte de valeur aux yeux des usagers et à la tendance à une consommation décorrélée des besoins réels. » Autrement dit, quand c’est gratuit, les irresponsables en profitent, surtout les pauvres qui n’ont rien d’autre à foutre que de passer leur dimanche aux urgences ou dans les salles d’attente des toubibs. Elle qui a été kiné dans le libéral doit en savoir quelque chose: les débiles n’ont que ça à foutre de venir se faire masser les fesses et pédaler dans son cabinet. Bien évidemment, il y a eu des remous dans la salle et la réponse en deux temps du docteur Pons valait son pesant d’or: 1) citation de Richard Bohringer: « On est dans la merde, même les cons! » 2) une question rhétorique: comment renvoyer à la responsabilisation individuelle les psychotiques dont justement l’un des problèmes majeurs, c’est l’altération de la responsabilité individuelle? La jeune députée (je dis jeune par l’âge mais son discours réac’ est aussi vieux que la Sécurité sociale à laquelle elle a fait référence sans scrupules) a eu l’air un peu confuse et a parfois mollement protesté contre les pointes de Pons mais elle s’est exfiltrée (elle était venue seule, le maire ayant autre chose de mieux à faire ailleurs) avant les interventions et les questions du public. Par un de ces hasards dont j’ai le secret, j’avais le matin même lu, dans « Le Pays Dolois » qui ne correspond pas exactement à l’idée que je me fais de l’autre presse, une interview de la susdite députée. Je vous en cite les derniers mots (je vous dispense de l’insipidité du reste) non sans vous avertir que Justine Gruet est enceinte et arrivera à terme mi-février 2024: «Mon équipe de collaborateurs prendra le relais, je ne suis pas inquiète. Je suis très contente de vivre cette double expérience, je ressens de la bienveillance. » Ah ben, qu’est-ce que ce serait si sa grossesse la mettait de mauvais poil! Et c’est quoi cette bienveillance qui fait réclamer la suppression de l’Aide Médicale d’État aux étrangers, l’AME, alors que ça coûtera plus cher de les laisser sans soins sur le territoire à moins que Ciotti ait un plan pour carboniser les migrants qui toussent? Comment peut-on oser parler du « piège de la gratuité » quand on profite comme tous les autres députés (pas moins pas plus), des largesses de la République? Quand on envoie ses mômes à l’école (même dans les établissements sous contrat, c’est nous qu’on paye!)? Justine Gruet tient donc le même discours que ses mentors conservateurs. D’une certaine manière, tant mieux! Il fut un temps où elle entretenait le flou un poil rebelle et non alignée et incitait à la dérision (ce qui est une marque de bienveillance chez moi!) républiconne plutôt qu’à la vacherie ici présente. Justine Gruet sort du bois et est donc moins hypocrite qu’auparavant. Et je n’ai décidément plus le coeur à me marrer de temps à autre avec elle.
À propos de l'auteur(e) :
Christophe Martin
Passionné de sciences humaines mais d'origine bretonne, je mets mes études en anthropologie et mon humour situationniste au service de mon action politique et sociale.
Formateur dans l'industrie et pigiste au Progrès
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