Francis Wurtz à Damparis
Le samedi 20 janvier 2024, le Parti communiste français (PCF) recevait son député européen honoraire Francis Wurtz à Damparis pour une conférence-débat sur le thème « Quelle politique internationale pour la France ? ».
Évoquant des conflits actuels (Russie-Ukraine, Israël-Palestine et Chine-Taïwan), il enjoint les dirigeants européens à s’interroger sur leurs responsabilités. Sur la Russie, il rappelle les faits depuis la chute de l’URSS en soulignant l’obsession des USA d’empêcher l’émergence de toute puissance concurrente via l’extension agressive de l’OTAN à l’est, malgré les tentatives de rapprochement de la Russie jusqu’à la fin des années 1990.
Francis Wurtz considère 2008 comment un moment charnière : Bush veut intégrer l’Ukraine à l’OTAN malgré les sérieuses mises en garde de la CIA ; la France et l’Allemagne, rétives, ne parviendront qu’à faire reculer l’échéance ; la proposition de structure paneuropéenne de Medvedev pour discuter des différends restera lettre morte auprès du Conseil européen. L’année suivante, le « partenariat oriental » forcera les anciens pays soviétiques à choisir entre l’UE et la Russie, clivera les populations ukrainiennes entre pro-occidentaux et pro-russes, et mènera à la crise de l’Euromaïdan, puis au conflit armé. L’eurodéputé alerte sur une fuite en avant aux issues inimaginables, et prévient qu’une implosion de la Russie ne pourrait que créer des guerres dans la région pour au moins 20 ans. Sans accepter ses annexions, il affirme qu’il faut réintégrer la Russie au concert des nations et prendre vraiment en considération des pays non-occidentaux.
Concernant la situation au Proche-Orient, il pointe la coresponsabilité des USA et de l’UE qui soutiennent implicitement la colonisation israélienne, empêchent la création d’un État palestinien et nourrissent ainsi le sentiment d’injustice.
Au sujet de la Chine, il rappelle la peur des États-Unis de perdre le leadership mondial face à ce concurrent systémique. Et notre camarade communiste de souligner avec sagesse que ce n’est pas notre problème, et que l’UE n’a pas à s’aligner systématiquement sur l’Oncle Sam.
Pour conclure et répondre à la question du jour, Francis Wurtz formule trois axes. Porter une politique internationale de prévention des conflits, par la diplomatie, la démilitarisation, et la promotion de toutes les sécurités globales : alimentation, santé, écologie, pauvreté, énergie… Sortir du « campisme » opposant « l’Ouest et le Reste » : il est plus que temps pour l’Occident d’acter la fin de son hégémonie et de cesser de mépriser le « Sud ». S’adresser aux peuples et pas seulement aux gouvernants : une France non-alignée et pacifiste retrouverait un vrai rayonnement international.
Après la conférence eurent lieu de riches échanges avec la salle qu’on ne détaillera pas ici faute de place. Néanmoins nous en relèverons deux.
À la question de savoir si la France peut encore avoir une politique étrangère tout en appartenant à l’UE, l’intervenant répond avec force trois fois oui, et préconise de mener une politique indépendante quand il n’y a pas de consensus européen, plutôt que de verser dans l’absurdité d’une moyenne molle de positions diamétralement opposées.
Puis sur l’enjeu des élections européennes sur les questions internationales, il répond sans ambage qu’il n’y en a pas, car le Parlement européen n’a aucune influence sur la politique étrangère et de défense. Et d’ajouter lapidairement que, en revanche, ces élections sont très importantes sur les questions économiques et sociales – sans développer son propos.
L’international partage assez nettement la NUPES : d’un côté le PCF et LFI, partisans d’une politique française indépendante, non-alignée et réaliste, et de l’autre LEEELV et le PS, adeptes d’une vision européiste (et donc occidentaliste, voire atlantiste) un peu hors-sol.
Une conférence-débat instructive et d’un bon niveau, mais on peut s’étonner de l’organisation par le PCF d’un tel événement en pleine campagne électorale européenne pour ne pas en parler du tout. Faut-il en conclure que le PCF n’est pas trop à l’aise au sujet de l’Europe ? Les mois à venir nous éclairerons peut-être…
Tintin 21.
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