Mode sombre

Critiquer les profs, c'est bien un truc de droite. Cette bande de gauchos, trop payés, toujours en vacances, en arrêt maladie, qui font grève pour un oui ou pour un non, n'ont pas la cote auprès de nos réacs nationaux. L'image du prof d'histoire barbu, syndiqué avec l'Huma sous le bras a la vie dure. 

Il paraît qu'il en reste. Personnellement je n'en ai jamais vu. Enfin si, un, et j'en profite pour le saluer chaleureusement.

La réalité est tout autre. La profession a bien changé depuis que les illusions soixante-huitardes se sont fracassées sur le mur néo-libéral. Changement d'époque, changement d'ambiance. Les profs ne seraient-ils pas tout simplement en train de redevenir ce qu'ils n'ont peut-être jamais cessé d'être ? Des petits notables réactionnaires, gardiens de l'ordre républicain laïcard, à tendances raciste, classiste et petit bourgeois ? Des agents de l'état dont la fonction est de perpétuer un ordre social inégalitaire ? Des chiens de garde de la morale nationaliste chargés de trier le bon grain de l'ivraie de notre chère patrie ?

Finalement, ne nous leurrerions-nous pas en pensant que les profs sont par défaut des camarades ? Ils votent massivement Macron quand même. C'est un indice.

En réalité, je n'ai rien contre les profs. J'ai passé l'âge. J'ai même de très bon amis profs. Un choix de carrière n'est jamais purement idéologique, mais avant tout le résultat d'un contexte matériel et socio-économique, d'un parcours de vie particulier. Les justifications morales et politiques viennent après coup.

Le souci n'est jamais l'individu, mais bien l'institution. Que les profs continuent de la défendre, de l'excuser malgré son bilan catastrophique en terme d'émancipation des individus, est assez logique.

Le monde est ainsi fait. On essaie de faire au mieux avec des moyens dérisoires. Quand on rentre chez soi sans avoir humilié d'enfant, on se dit qu'on a réussi sa journée. C'est déjà pas si mal. On prend la paie et on attend les vacances. Ça repoussera un peu le burn-out...

Quand on crie fièrement que « tous les flics sont des bâtards », que « tous les hommes sont des déchets » ou que « tous les politiciens sont des pourris » (coucou Gérald!), on sait bien que « y en a des biens ». C'est pas le problème. On ne critique pas les personnes, mais bien les fonctions sociales, les institutions. Peut-être serait-il temps à gauche d'oser enfin crier « APAB ». D'enfin voir en quoi l'école républicaine est une arme au service du pouvoir absolument redoutable et que s'en servir contre lui est une stratégie bien rarement efficace.

Allcatsarebeautifull.

PS : Au passage les profs, quand vous vous plaigniez, et c'est bien légitime, des projets de loi sur l'inclusion des personnes handicapées, essayez de ne pas être d'immondes validistes. Merci. Et force à vous.

Tout ne sera pas d'accord avec ce qu'on vient de lire et on peut donc aussi aller voir cet article.


Partage :




Licence Creative Commons Article mis à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Attribution - Pas d'Utilisation Commerciale - Pas de Modification 4.0 International.



À propos de l'auteur(e) :

La Rédac'

Donner la parole à ceux qui ne l'ont pas, voilà une noble cause ! Les articles de la Rédac' donnent le plus souvent la parole à des gens que l'on croise, des amis, des personnalités locales, des gens qui n'ont pas l'habitude d'écrire, mais que l'on veut entendre...


Média associatif

Retrouvez tous les articles de La Rédac'